Par Badreddine BEN HENDA

Pendant ces vacances scolaires et universitaires du printemps, beaucoup d’hôtels ont fait le plein, notamment en fin de semaine. Les familles tunisiennes qui en ont les moyens n’ont pas privé leurs enfants d’un séjour de deux ou trois jours sur la côte ou à l’intérieur du pays. Un ami m’a juré que, le week-end dernier, à Tabarka, l’hôtel où il comptait passer deux nuits affichait complet. Dans plusieurs maisons d’hôtes, les places sont tout aussi rares et tout aussi chères. Le mauvais temps qui sévit depuis samedi n’a empêché personne apparemment de voir du pays dans son propre pays. Que c’est réconfortant d’apprendre de telles nouvelles qui nous changent des avis de grèves répétées de cette deuxième quinzaine de mars 2022.

Il faut bien un printemps après l’hiver. Et ceux qui aiment vraiment leur pays courent à son secours lorsqu’il a plus que jamais besoin d’eux. Les Tunisiens qui ont passé les neuf derniers mois à manifester et à criailler contre Kaïs Saïed, son « coup d’Etat » et son projet de dictature feraient bien d’observer une halte pour sortir de Tunis et de l’Avenue pour se rendre quelque part dans un hôtel sur la côte, sur les hauteurs du Nord-ouest, ou du côté de Tozeur et de Kébili. Ils ont l’agent pour ça, presque tous ! Ce ne sont pas eux les citoyens qui pâtissent le plus de la crise économique, de la pénurie, de la cherté de la vie, des coupures de l’eau ou de l’électricité ni des grèves de la municipalité, de la CNRPS, des agents de la Poste, etc.

Non ! Pas eux ! Et à supposer qu’ils manquent de sous pour aller « se promener », qu’ils en demandent aux partis et aux organisations qui les mobilisent pour leurs sorties « citoyennes ». Ils ont de l’argent, eux ! Et ils le réservent apparemment pour financer un coup d’Etat dans le coup d’Etat, comme dirait l’ancien Président Mohamed Moncef Marzouki ! Pourquoi ne pas demander de récompense pour les services loyaux rendus aux adversaires connus et riches de Saïed et de son « harak » du 25 juillet ? Un congé payé; un week-end au bord de la mer; des randonnées à Aïn-Draham; des virées à Matmata ! Ils ont mérité ça, non?!

Ainsi au moins, ils aideraient le tourisme tunisien à se refaire un semblant de santé. Qu’ils (qu’elles) sortent de Tunis en famille ou avec des ami(e)s, des maîtresses ou des amants. Ils peuvent observer un répit dans leurs protestations ! Qu’ils décident une grève de trois jours comme le veut la mode pseudo-syndicale maintenant ! Ah ! Si la protestation faisait la grève illimitée dans notre pays exsangue ! Dix ans de protestations non-stop, ça ne leur suffit pas, aux contestataires-nés ? Qu’ils arrêtent de mentir eux aussi ! Une fois au pouvoir, ils ne feraient pas mieux que leurs prédécesseurs, même pas mieux que Ben Ali et Bourguiba qu’ils accusent de tous les maux !

Allez manifester dans les hôtels, messieurs et mesdames les protestataires. Le Gouverneur de Tunis a proposé à Hamma Hammami d’emmener son groupuscule jacasser du côté des belles résidences du Lac 2. Moi, je propose à tous les chahuteurs d’aller brailler sur les plages dorées, au sommet des dunes de sable, à Dougga, en haut des Tables de Jugurtha, à Subeïtla, au Colisée d’El Jem, sur une piste de danse ou dans le SPA d’un hôtel étoilé. Montrez que vous aimez la Tunisie, messieurs-dames ! Allez dans un hôtel, un gîte rural, une auberge, une maison d’hôte ! Si, bien sûr, vous aimez votre pays autrement que par la protestation plutôt suspecte !

B.B.H.