Ces derniers temps, entre l’apogée de la crise économique et sociale, le chômage, l’inflation… la plupart des familles tunisiennes vivent un cauchemar quotidien pour subvenir à leurs besoins les plus nécessaires. Sous Ben Ali, on se vantait d’une classe moyenne qui représentait plus de 80% de la population. Aujourd’hui elle est désormais en voie de disparition. Selon les résultats d’une enquête menée par l’Institut tunisien d’études stratégiques (Ites) en 2018, le pourcentage de la classe moyenne a chuté de 20% en 8 ans seulement, passant de 70% en 2010 à 55% en 2015 pour frôler les 50% en 2018. Phénomène qui creuserait davantage les disparités sociales.
Dans ce contexte, l’expert en économie Azeddine Saïdane a déclaré que les classes sociales tunisiennes ne subissent pas, à parts égales, l’inflation que connaît le pays, à cause de la hausse des prix. Il a affirmé que les fonctionnaires du public et du privé qui représentent la classe moyenne, ne peuvent pas faire face. « Ils en assument les conséquences, alors que d’autres catégories sociales s’y adaptent et en tirent même profit, notamment les commerçants et ceux qui exercent des professions libérales qui peuvent augmenter les prix et les marges de bénéfice de leurs activités », a-t-il relevé. Saïdane a, d’autre part, souligné que l’inflation a causé l’effritement de la classe moyenne -60% de la population- qui représente un facteur de stabilité politique, sociale et économique. « Aujourd’hui, une partie de cette classe a rejoint les catégories à faible revenu ou même nécessiteuses », a-t-il soutenu.
Les prix ? Mieux vaut ne plus en parler…
Un constat pas du tout étonnant, puisque selon l’Institut National de la Statistique (INS), l’inflation a confirmé sa tendance haussière en atteignant 7,2%, au mois de mars 2022, contre 7% en février et 6,7% en janvier. Selon la même source, les prix à la consommation avaient connu une hausse de 0,8% sur un mois. Ainsi, ils ont progressé, au cours du mois de mars 2022, de 0,8% après 0,3% au mois de février et 0,7% en janvier. En mars 2022, les prix de l’alimentation ont augmenté de 8,7% sur un an. Cette hausse provient principalement, du renchérissement des œufs de 22,2%, de l’huile d’olive de 20,6%, des fruits frais de 18,9%, des prix des volailles de 14,1%, du lait et du fromage de 8,8%, des poissons frais de 8,6% et des dérivés de céréales de 7%. Pour les services, les prix ont bondi de 4,7% sur un an. Cette augmentation est due à la hausse des prix des services des restaurants, cafés et hôtels de 7,1%, des services de santé de 4,1% et des loyers de 4,4%, d’après la TAP.
Face à cette situation, les Tunisiens se trouvent dans une situation de plus en plus difficile avec des revenus limités et d’énormes pressions budgétaires. Aujourd’hui à l’approche de l’Aid, le président de la chambre nationale des commerçants de la friperie, Sahbi Maalaoui, a assuré qu’une grande affluence des Tunisiens dans les boutiques de friperie a été constatée, et ce, à cause de la chute de leur pouvoir d’achat et la hausse des prix dans les magasins du prêt à porter. Heureusement qu’il reste encore cette alternative pour pouvoir s’habiller.
On fait ce qu’on peut…
Y a-t-il des solutions ou des décisions prises pour préserver le pouvoir d’achat des Tunisiens qui ne cesse de baisser ou devons-nous s’attendre au pire ? Ne serait-il pas temps de stopper cette hémorragie ?
Il est vrai qu’’à partir du 24 avril courant des aides seront distribuées au profit de 278 mille familles tunisiennes d’une valeur de 60dt par famille à l’occasion de Aid Al Fitr”, a annoncé le ministre des affaires sociales Malek Zehi. Zehi a rappelé que les aides financières ont été mobilisées au profit de 275 mille familles d’une valeur de 60dt par famille. Le nombre des bénéficiaires sera augmenté avant la fin de l’année en cours pour atteindre près de 310 mille familles, a ajouté le ministre. La valeur des aides octroyées au cours du mois de ramadan est estimée à 9 millions dinars. Et après ? Les aides restent limitées vu la situation économique actuelle de l’Etat. Il faudrait trouver d’autres solutions pour résoudre ce problème à long terme. Notamment faire face au chômage et de pouvoir créer de nouveaux postes d’emploi, d’encourager l’investissement et soutenir les startups…
Pour limiter les dégâts de cette situation, des mesures urgentes doivent être entreprises par le gouvernement, même les familles aisées devraient faire partie des solutions. Si chaque famille riche faisait don d’argent au profit des familles nécessiteuses, cela aiderait énormément à porter secours dans l’immédiat au gros problème de disparités sociales qui se creuse de plus en plus. « Notre premier devoir est la solidarité humaine et sociale »
Il est vrai que des associations résolument engagées dans les aides sociales tout autant que des composantes de la société civile ne cessent de venir en aide aux plus démunis. Mais c’est insuffisant. C’est à l’Etat s’insuffler la solidarité. Lui, en premier. Parce que, plus que jamais, il faudra un élan social à l’unisson. Un élan qui n’ait pas des arrière-pensées politiciennes. Suivez mon regard, comme on le dit…
Leila SELMI