La galerie de BIR LAHJJAR abrite une exposition personnelle de l’artiste peintre Hanen Ouenniche du 18 juin au 15 juillet 2022, intitulé « Réalité imaginaire ». L’exposition comprend environ vingt-cinq tableaux, de tailles variées.
Hanèn Ouenniche est titulaire d’une licence en gestion industrielle. Sa formation scientifique ne l’a pas empêchée de faire preuve de créativité artistique. Elle a consacré son temps à l’art. Elle aimait dessiner depuis sa jeunesse, et sa passion pour l’art l’a amenée à se lancer dans cette aventure. Elle expose régulièrement dans les expositions organisées par l’Union des Artistes tunisiens et la fédération tunisienne des Arts Plastiques. Elle présente également ses œuvres dans des expositions collectives organisées dans des galeries étatiques ou privées.
Elle a représenté la Tunisie parmi 111 artistes de 44 pays, dans un projet international « Vers un nouveau monde avec l’association française : l’art du nouveau ». Quant à sa première exposition personnelle, elle avait pour titre « Djerba dans mes rêves ». Celle-ci « réalité imaginaire ». L’artiste continue à raconter, à peindre et à interpréter ses rêves, en se référant aux inspirations de l’île, à partir de belles scènes visuelles.
L’artiste retourne à ses sources et peint l’île de Djerba, sa mer, ses joies, ses femmes, ses édifices, à travers une douce imagination. Il est difficile de classer son style de peinture, il est unique, simple et profond, enfantin et fantastique. Il se situe entre la peinture semi-figurative et l’art brut. C’est un style caractérisé par des lignes fines, des couleurs enfantines légères et calmes.
Hanen Ouenniche s’évade du réel vers un monde imaginaire. Elle ne peut pas quitter totalement la réalité, elle la substitue par une autre, issue de l’imagination. En peignant, elle s’évade d’un quotidien commun vers un quotidien irréel, elle crée un monde propre à elle. Elle nous propose une nouvelle conception de la beauté, dans laquelle l’île imaginée sera une terre de joie enfantine. Grâce à une palette riche et vive, Hanen Ouenniche retrace des évènements vus ou vécus. C’est comme si elle essayait d’écrire son journal intime, à la fois vécu et imaginé.
L’artiste a choisi pour ses peintures les titres suivants : (Hello, Djerba Homes, Djerba Camels, Camel Ride, Djerba doors, Palme tree, Olive tree, boating, Fishing, Rami, Fini le confinement Walking to the souk, Voiture magique, Lovers, Sun taining, The bride, The stars path, Starry night, seguia Beatch, Poterie, habits, Les musiciennes, Danse zguara, Mille nuits et nuit et autres…).
Les titres à ses vingt-cinq travaux sont très significatifs et révèlent aisément la portée de l’œuvre. L’artiste aborde plusieurs thèmes ayant trait avec sa ville natale « Djerba ». C’est ainsi que « Walking to the souk » : Ce tableau évoque la scène du shopping à Djerba. Al-Jerbi apparaît tenant le panier, dans sa tenue traditionnelle (Blouza), se dirigeant vers le marché, au milieu de la foule.
« The Bride » est un autre tableau qui représente l’événement d’Al-Jahfa à Djerba, mais l’artiste change les paramètres de la scène, rendant le visage de la mariée visible dans sa splendide beauté. D’autre part, l’impact du public et des musiciens sur la scène est diminué. La mariée C’est l’événement principal de la scène, alors pourquoi se cache t-elle ? Il semble que le peintre, qui dessinait ce tableau, ait été influencé par la curiosité des enfants. Parce que la curiosité des enfants a le pouvoir de leur faire voir et imaginer ce que l’œil nu ne peut pas voir. Peut-être, l’artiste critique ici un modèle de perceptions traditionnelles, qui cache la mariée dans la scène d’Al-Jahfa, et donc elle a voulu la représenter sous une autre image.
La scène des chameaux se répète différemment, dans deux autres tableaux (The Stars Path, Starry Night). Le premier aborde la scène du voyage nocturne à dos des chameaux. L’artiste peint le ciel avec la touche de Van Gogh et le remplit d’étoiles brillantes. La couleur des chameaux est en harmonie avec la couleur de la terre, mais ses mouvements obéissent au désir de celui qui les conduit. Les palmiers apparaissent en haut de la scène dans leur belle gloire. Dans (Starry Night), c’est une miniature de la peinture précédente, mais cette fois-ci l’artiste nous propose une autre couleur pour le chameau, accompagné de son propriétaire qui le tient et le conduit. L’artiste remplace la coloration habituelle, par une coloration linéaire et en couches. Elle utilise la coloration enfantine, avec des formes fines, des lignes pointillées ou discontinues.
L’image du chameau rieur (Djerba Vibes) bordant les plages de l’île révèlent plusieurs significations. Ces scènes font la promotion du tourisme de manière intelligente et ludique. Lorsque le spectateur les contemple, il ressent de la joie et de la gaité. Elles diffusent des ondes positives et des énergies amusantes. Le peintre s’évade vers des souvenirs d’enfance, pour imaginer un monde différent et beau, éveillant dans l’âme une joie profonde et la soulageant du poids du présent. Comme si elle se souvient d’un bon moment qui lui manque, où les rêves avaient leur saveur et l’île avait sa joie. L’artiste s’éloigne du réel, il se dérobe derrière ses couleurs enfantines, mais elle repense intrinsèquement des questions liées à l’île de Djerba, à savoir l’étalement urbain, la crise économique après Corona, et le changement remarquable au niveau des valeurs morales et esthétiques.
Le visiteur se laisse porter par les portraits (Sun Taining, Olive Tree, Djerba Vibes, Lovers, The Fishermen, Palme tree), avec un style amusant. L’artiste a essayé d’apporter de la joie à ces portraits. Elle a également combiné d’autres images ou formes en couches, de telle sorte que derrière un seul portrait se cache d’autres portraits. Les histoires se mêlent les unes aux autres. Les formes géométriques révèlent le style architectural distinctif de l’île, sous la forme de dômes continus, et évoquent le style du peintre tunisien Néjib Belkhoja. Ceci est plus évident dans les tableaux suivant (Djerba Kamels, Djerba Doors).
La peintre s’est appuyé sur une technique mixte, dans la plupart des tableaux. Elle utilise tout ce qui peut l’aider à exprimer ses fantasmes, acrylique, stylo feutre, marqueur, crayons, encre, papiers, papiers colorés…. Elle joue avec les couleurs, les lignes et formes.
Cette réalité imaginaire, transforme des scènes familières en fantaisie. Grâce à une représentation unique, des couleurs douces, des lignes flottantes, Hanen Ouenniche éveille en nous la saveur du jeu libre. Elle nous emmène vers un monde innocent, gaie et libre.
Faouzia DHIFALLAH
(Université Tunis Al Manar)