Comment sauvegarder des pratiques chorégraphiques sans pour autant réduire leurs interprètes à des archives vivantes ? Comment conserver les savoir- danser aujourd’hui sans les faire perdre leur dynamique et sans les momifier ? La rencontre entre la danse contemporaine et la danse traditionnelle est-elle possible? Comment et pourquoi?

Les deux créations chorégraphiques tunisiennes « Waddouni In progress » de Imed Amara (Troupe nationale des arts populaires et Zied Zouari et « Rboukh » de Wael Marghni répondent bel et bien à ces questions qui font de la danse contemporaine un trait d’union entre un héritage chorégraphique riche en pas, en mouvements, en rythmes et en émotions et le futur avec toutes les possibilités qu’offrent également les nouvelles technologies de l’information.

Puisant dans la mémoire de la Tunisie, dans un patrimoine musical et chorégraphique dense, les deux créations ont réussi à susciter la curiosité du public des Journées chorégraphiques de Carthage attirant de nombreux professionnels et également des jeunes qui ont voulu découvrir les champs d’intersection entre deux mondes ayant leurs codes spécifiques et leurs univers propres mais qui ont en commun le corps.

Dans cet esprit de recherche, de sauvegarde, de transmission et également de réflexion sur les pratiques chorégraphiques traditionnelles, l’artiste chorégraphe Wael Marghni a conçu son « Rboukh », création qui tire sa force de sa mémoire d’enfant et d’adolescent qui a ouvert les yeux et a grandi dans les ambiances très particulières du quartier « Bab Al Falla », très souvent rythmées par des fêtes religieuses comme familiales où on sentait dans l’air l’encens et on est porté par les sons du darbouka.

Pour ce nouveau projet, l’artiste a choisi de récupérer ses histoires mystérieuses et ses trésors du patrimoine immatériel enfouis dans la mémoire collective comme individuelle pour imaginer ce « Rboukh » (expression du dialecte tunisien qui veut dire une fête très rythmée) dans les années à venir, dans les années 2030, dans un monde où tout est contrôlé.

Voulant toujours créer des passerelles entre les chorégraphes d’hier et d’aujourd’hui dans un souci de relève mais aussi d’appui des recherches académiques et artistiques sur le patrimoine chorégraphique et ses usages aujourd’hui et les enjeux de sa conservation, la 4e édition des Rencontres chorégraphiques de Carthage ont proposé au grand public, professionnels et amateurs, la nouvelle création de la Troupe nationale des arts populaires intitulée « Waddouni in progress ». Œuvre qui s’ajoute au catalogue de cette compagnie artistique qui vient de fêter sa soixantième bougie et qui a réussi au fil de son parcours de préserver la mémoire chorégraphique, gestuelle, musicale et même vestimentaire à travers une série de créations et de tableaux.

Porté par la beauté de l’arrangement musical d’une chanson du patrimoine musical de Kerkennah, assuré par le violoniste Zied Zouari, Imed Amara, directeur artistique de la Troupe nationale des arts populaires, danseur de son état, a pensé utile de mener un projet à la croisée des chemins, entre l’hier et l’aujourd’hui, la tradition et la modernité, où les instruments traditionnels de musique se côtoient avec le violon.

De cette volonté de faire dialoguer différentes expressions artistiques et également des instruments de musique de divers univers, « Waddouni » est née pour raconter l’histoire de cette jeune tunisienne rebelle et curieuse qui voulait tout savoir sur sa Tunisie bien aimée, qui voulaient voyager aux rythmes, aux parfums et aux saveurs de sa terre, à la découverte de ses racines.

(Communiqué)