On appréhendait cette tournure des choses depuis des semaines. Les tractations autour des règles de couverture médiatique de la compagne électorale aboutissent à une discorde entre la haute autorité indépendante pour la communication audiovisuelle (HAICA) et l’instance supérieure indépendante des élections (ISIE). À quelques jours du démarrage de la compagne électorale prévu au 25 du mois courant, les journalistes se trouvent face à deux décisions différentes portant sur les règles de couverture médiatique. La première décision est communiquée une semaine avant par la HAICA alors que la deuxième est publiée par l’ISIE quelques jours après.
L’instance des élections se justifie par sa gouvernance générale du processus électoral. Son porte-parole, Mohamed Tlili Mansri, va plus loin en accusant même la HAICA de saboter le processus électoral. Lors de ses apparitions médiatiques, il évoque l’article 67 du code électoral et se rattache à la gouvernance générale des élections. Mansri appelle les journalistes à appliquer les directives de l’ISIE. Pour la HAICA, l’instance régulatrice, la décision de l’ISIE est en contradiction avec l’article 134 de la constitution, lequel fixe les prérogatives de l’ISIE. Le dernier communiqué de la HAICA évoque même le recours à la justice contre les directives de l’ISIE, comme il pointe les dépassements de l’instance des élections en relation avec la couverture médiatique des élections. Pour la HAICA, les directives de l’ISIE représentent une atteinte à la transparence et à l’intégrité de la couverture médiatique d’autant plus qu’elle représente une menace pour les libertés. L’ISIE menace de prison pour toute infraction à ses directives, d’autant plus qu’elle rejette la participation de toutes oppositions aux élections alors que la HAICA exige l’inclusion des différentes parties prenantes dans les élections. « La décision de l’ISIE menace l’avenir de la liberté d’expression et d’information », indique-t-on dans le communiqué de de la HAICA qui précise que cette décision induira une anarchie au niveau de la gestion de la couverture médiatique de la compagne électorale. À travers sa décision, l’ISIE compte même exclure les différents intervenants (cour des comptes, tribunal administratif) dans le processus électoral. Il faut dire que l’instance des élections compte même installer un observatoire pour le « contrôle » de la couverture médiatique des élections. L’idée est avancée depuis la compagne référendaire.
Le SNJT soutient la HAICA
En tout cas, les médias se trouvent pour la première fois face à deux décisions relatives aux règles de la couverture médiatique des compagnes électorales. L’ISIE appelle à l’application de sa propre décision, alors que la HAICA évoque sa gouvernance générale du secteur en vertu du décret 116, puisque constitution de 2022 ne prévoit pas une instance régulatrice. Le syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) intervient en soutenant la décision de la HAICA et surtout en pointant les dépassements de l’ISIE. Le SNJT évoque une spoliation des prérogatives de la HAICA tout en évoquant que les dépassements à la pelle de l’ISIE. D’après le président du syndicat, l’instance des élections, dont les membres sont désignés par le pouvoir politique, n’a pas le droit de dépasser la HAICA en annonçant ses propres directives de couverture médiatique. Le président du SNJT, évoque surtout les dépassements de l’ISIE en relation avec les candidatures. « Les décisions récentes du tribunal administratif en atteste », explique-t-il tout e précisant que le syndicat appelle les journalistes à respecter les décisions de la HAICA au détriment de celle communiquées par l’instance des élections.
Zied Dabbar