Par Samia HARRAR
Nous ne pouvons pas nous permettre le luxe, de comptabiliser par continents. Pour l’heure, il s’agit de se rappeler les propos, fort judicieux et autrement visionnaires, de celui dont il est toujours opportun de convoquer le souvenir, lorsqu’il s’agit de diplomatie et de relations internationales. A savoir, la sacro-sainte neutralité.
Bourguiba, pour ne pas le nommer, avait compris très tôt, l’importance, pour un petit pays comme le nôtre, de se garder à égale distance de tout le monde, lorsqu’un concours de circonstances implique que l’on doive prendre position, en nous rangeant d’un côté, ou d’un autre parce qu’il y aurait une pression internationale qui nous mettrait dans l’embarras en regard de conflits géostratégiques entre de grandes puissances, ou même, de pôles, de moindre importance sur l’échiquier; mais constitués en tant que tels pour résister, et pour défendre à leurs tours, leurs propres intérêts en jeu, et que nous serions, de notre côté, dans la posture, jamais confortable, du quémandeur. Parce que, tout simplement, le risque y est d’y laisser plus que des plumes. Et d’avoir plus à y perdre qu’à y gagner.
En ne regardant pas plus loin que le bout du nez, nous pourrions certes, grignoter quelque longueurs d’avance, sur le court terme, et même sur le moyen, mais il y a fort à parier, que sur le long terme, puisqu’il n’y a rien de pérenne et donc aucune garantie, qu’un battement d’ailes de papillon, de l’autre côté du monde, suffise pour que l’échiquier se renverse et que les rapports de force, dans la foulée, en accusent le coup. Par conséquent, le résultat en serait que la Chine, pouvant supplanter aujourd’hui la Russie, minée par sa propre offensive contre l’Ukraine, où elle se trouve, du moins actuellement, en terrain « embourbé » pourrait fort bien demain, se faire talonner , et bientôt supplanter une fois encore, par une Russie, qui aurait gagné la dernière manche et réussi à se remettre en selles, à nouveau ; toujours face à une Amérique, laquelle, si elle est astreinte, sur le plan intérieur, à gérer ses propres contradictions, qui menacent certes, un jour ou l’autre, de porter un « coup » qui peut lui faire très mal et la faire vaciller si elle n’y prenait garde, à l’extérieur, elle s’arrange toujours pour tenir la « dragée haute » à ses contradicteurs, ayant suffisamment « balisé » le terrain en amont et « semé à tout vent » pour se permettre le luxe de tirer dans les « pattes » de tout ce qui pourrait vouloir se dresser sur son chemin pour empêcher son «ascension ». Dans ce jeu de « quilles » où elle n’est pas passée maître, parce que ce n’est ni sa vocation ni son rôle, et parce qu’elle a une autre stature, qui est tout à fait défendable dans une autre logique aux antipodes de tous les hégémonismes, la Tunisie ne doit pas craindre d’aller chercher ses intérêts là où ils sont, sans pour autant se « fourvoyer » dans des postures, qui ne pourraient que lui porter préjudice. Elle n’en n’a, tout simplement pas besoin.