L’heureuse maman vient de regagner sa chambre après avoir mis au monde une mignonne petite princesse dans une clinique huppée de la place. Les membres de la famille portant tous une bavette sont dans le couloir veillant scrupuleusement à la bonne santé de la nouvelle venue entrebâillant discrètement la porte de la chambre pour deviner de très loin les traits et la frimousse du petit ange. L’ambiance étant à une joie indescriptible. Liesse de courte durée et pour cause : Le pédiatre s’amène en coup de vent et somme la maman en ces termes crus, alarmants : » Tous les lits de réanimation infantile à la clique sont saturés, de même que ceux dans les hôpitaux. Vous assumez l’entière responsabilité lors des trois premiers mois d’une éventuelle atteinte respiratoire de votre enfant, la Bronchiolite (sic) ». Sur ce, il tourne les talons et s’en va avertir ou plutôt semer la discorde, la terreur au sein d’autres foyers festoyant également l’accouchement d’une proche maman dans les chambres avoisinantes.
Revirement de 180°
La suite est facilement envisageable. Le couloir se vide, la smala quittant les lieux dare dare. La pauvre maman souffrant le martyr et craignant le pire pour sa petite fondant en larmes difficilement consolée par » l’ex-heureux » papa portant un masque ne sachant plus s’il doit déguerpir ou rester au chevet de son épouse. Un manque de tact désolant et grandement condamnable. Le message aurait pu et dû être transmis avec des mots plus gentils, moins choquants, avec tact quoi. Résultat des courses, le retour au bercail se fait dans l’isolement le plus total, seuls papa maman et les grands-parents maternels sont-ils autorisés à y être. Point de youyous traditionnels histoire de na pas ameuter les voisins. Les visites de félicitation habituelles étant interdites pendant tout un trimestre, les quantités faramineuses de gâteaux traditionnels, de « Zrir »** ayant couté les yeux de la tête au ménage demeurant sans preneurs…L’ambiance festive habituelle en pareilles circonstances se muant en sinistrose, phobie, surveillance de la moindre salve d’ éternuements, de la moindre quinte de toux même provenant de l’extérieur du domicile , de la rue ou à travers les cloisons de séparation avec le voisin limitrophe du pallier. Il va sans dire que la seule possibilité des membres restants de la famille pour se pâmer de la beauté de la petite se limite au visionnage de quelques séquences vidéo, de rares photos, de brefs gazouillements.
La Bronchiolite, c’est quoi au fait ?
La bronchiolite est une infection virale très contagieuse des bronches les plus petites, les bronchioles, qui amènent l’air tout au fond des poumons. Elle s’observe chez l’enfant de moins de 2 ans et surtout chez le nourrisson de moins de 8 mois. Dans plus de 80 % des cas, la bronchiolite est due au virus respiratoire. Une bronchiolite commence comme une simple rhinopharyngite, avec une légère fièvre, un nez qui coule et une toux sèche. Le nourrisson présente ensuite une respiration rapide entrecoupée de pauses, notamment pendant les repas. Il est agité, boit de moins en moins et repousse ses biberons. Ses bronches sont encombrées par des sécrétions qu’il n’arrive pas à évacuer. Dans certains cas, les difficultés qu’éprouve l’enfant pour respirer peuvent se transformer en détresse respiratoire nécessitant une hospitalisation, voire des mesures de réanimation.
Situation préoccupante
Les pédiatres et même les médecins généralistes enregistrent ces derniers jours une montée en flèche des cas de bronchiolites pas toutes graves, fort heureusement. Mais le tableau est alarmant, spectaculaire notamment pour les parents. Constater que le rejeton respire difficilement, siffle de partout, refuse le biberon et /ou rend tout une fois la tétée terminée ne doit pas être facile à comprendre et encore moins à admettre. Le recours à l’internet avec des textes pondus par des pseudo-spécialistes ne fait que corser la situation et quintupler les appréhensions. Généralement, un suivi rigoureux et à la lettre des recommandations du praticien fait sortir le bébé d’affaire. Les complications sont certes possibles mais pouvant se raréfier au cas où les consignes sont scrupuleusement appliquées.
La pénurie des médicaments complique les choses
Un ballet incessant du pauvre papa une fois ayant ramené sa douce moitié et sa progéniture bien au chaud à la maison. A deux, trois fois voire plus, il revient chez le médecin avec toujours la même réclamation : » Médicament inexistant, prescription à modifier ». Personne ne veut être à place du pauvre toubib ayant les mains liées d’autant que la panoplie de remèdes pour les nourrissons se rétrécie de jour en jour comme peau de chagrin. Ni princeps, ni génériques, ni parents éloignés du générique ne sont dans les étals des officines à l’instar d’une très longue liste d’autres médicaments pour adultes et touchant des secteurs des plus névralgiques (cardiaques, diabétiques, cancéreux, insuffisants rénaux etc.).
Lourdes dettes pour la pharmacie centrale
La Pharmacie Centrale de Tunis (PCT) ne peut plus importer une grande brochette des médicaments vitaux ne disposant plus des liquidités idoines pour le faire. Les caisses et les organismes de sécurité faisant la sourde oreille en s’obstinant à ne pas lui payer leurs lourdes dettes et redevances. Les gros laboratoires et autres firmes pharmaceutiques mondiales en sont arrivés à fermer les vannes. Pas d’argent sonnant et trébuchant, pas de commandes à honorer. Seule une intervention énergique de l’état pour renflouer les finances de la (PCT) est de nature à redonner le sourire aux pauvres malades, à leurs proches, constatant impuissants la décrépitude vertigineuse de l’état de santé de l’être cher sans pouvoir voler à son secours, sauver son pronostic vital, éloigner de lui le spectre menaçant d’une fin tragique qu’on parvenait aisément à éviter sous nos cieux il n’y a pas si longtemps ! Une intervention de l’état difficilement envisageable par ces temps de vaches maigres, de marasme économique paralysant nos différents rouages. Si ce n’est grandement malheureux…
Mohamed Sahbi Rammah