Dans un contexte global de crise économique, la patrimonialisation du rural s’est imposée comme une nécessité. Le patrimoine paysager et agricole hammamettois, menacé, nous interpelle tous pour le valoriser, le préserver et le transmettre aux générations futures à l’heure où la biodiversité est en déclin, subissant une érosion sans précédent. C’est dans ce cadre-là que s’inscrit le programme de valorisation du patrimoine agrumicole hammamettois par l’Association d’éducation relative à l’environnement. Conserver cette biodiversité agronomique revient de surcroît à participer à la sauvegarde de ce patrimoine historique. Ces espèces d’agrumes sont souvent issues de centaines, voire de milliers d’années de sélection humaine, elles sont des exemples de notre coévolution avec notre environnement. De plus, elles sont reliées à de nombreux savoirs ancestraux et traditionnels. Les conserver c’est ainsi conserver notre histoire, nos cultures et nos savoirs.
Hammamet est un grand verger, des habitants, des métiers, des jardins, une culture, une identité, des savoir-faire et des traditions ancestrales. Et le patrimoine agrumicole est une des composantes essentielles de l’identité locale. En effet, depuis des siècles, des conditions naturelles favorables trouvèrent une communauté paysanne active, entreprenante et rompue de vieille date aux techniques de l’arboriculture irriguée (citronnier, oranger). Ce qui permet à un terroir de se constituer et de se développer dans le temps avec comme élément de base, le verger. Les Ottomans et les Andalous établis à Hammamet au XVIème siècle contribuèrent aussi à la constitution de ce patrimoine en apportant leur savoir-faire agricole. Le savoir traditionnel du paysan s’appuie sur la maîtrise des techniques de l’irrigation (construction de puits de surface, utilisation du dalou avec traction animale, aménagement de séguias délimitées par des qsimas), et par l’art hammamétois, quasi exclusif au Cap Bon, de la pépinière. De même, le fellah hammamétois possède un savoir-faire séculaire de valorisation des produits du verger.
En effet comme le précise Dr Salem Sahli, secrétaire général de l’Association d’Education Relative à l’Environnement de Hammamet (A.E.R.E) le patrimoine agrumicole à Hammamet est une des composantes essentielles de l’identité locale. « Depuis des siècles, des conditions naturelles favorables rencontrèrent une communauté paysanne active, entreprenante et rompue de vieille date aux techniques de l’arboriculture irriguée (citronnier, oranger) dit-il . Cette rencontre permit à un terroir de se constituer et de se développer dans le temps avec comme élément de base : le verger. Mais cet héritage ancien est aujourd’hui fortement menacé par le développement intensif du tourisme, l’étalement urbain, la croissance démographique galopante, la spéculation foncière, le morcellement des terres, les conflits autour de l’eau, le manque de sensibilisation des citoyens et la faiblesse voire l’absence de l’action publique. Résultats : Les canaux et outils d’irrigation traditionnels sont abandonnés ou détruits, les vergers en friche sont légion et nous assistons à une érosion du savoir-faire des paysans hammamétois en matière de gestion des vergers et de conduite de l’irrigation. C’est dans ce contexte qu’est né le projet de création de l’écomusée de l’orangeraie. Il ne s’agit nullement de muséographier un patrimoine en le figeant dans un espace d’exposition, mais au contraire de le faire revivre en l’arrachant de la « pénombre de l’insignifiance » qui risque de le jeter définitivement dans l’oubli. Faire vivre le patrimoine agrumicole de Hammamet, vivre de ce patrimoine et lui redonner ses lettres de noblesse, tel est en définitive le défi que nous nous proposons de relever » en organisant le festival des agrumes. Par ses impacts sociaux, culturels, économiques et environnementaux, ce festival s’inscrit parfaitement dans une démarche de développement local durable. En effet, grâce à une facilité d’accès à l’éducation et à la connaissance de leur patrimoine, ce festival ne manquera pas de réconcilier les habitants avec leur identité et de favoriser la réappropriation de leur héritage matériel et immatériel. Il contribue également à l’amélioration du revenu familial grâce à la relance des activités de production et de transformation agricole ainsi que des métiers artisanaux. Mais l’impact le plus important est sans conteste la promotion d’un autre produit touristique local complémentaire du tourisme balnéaire. Tourisme culturel, agricole, rural, écotourisme…Les appellations pullulent, mais toutes renvoient à un concept de tourisme alternatif (porté vers d’autres solutions possibles) qui s’oppose au concept de tourisme industriel, un concept qui renoue avec le sens des limites.Un tourisme « doux » plus proche de l’environnement, un tourisme à visage humain, plus curieux et respectueux des traditions locales et qui tienne compte des populations, de leurs modes de vie et des répercussions des projets sur leur territoire.
Kamel Bouaouina