Mercredi 14 février. C’est la fête de Saint-Valentin. La fête de l’amour. Un rendez-vous devenu incontournable chez nous. Tout le monde, qu’on le veuille ou non, est censé aimer et être aimé ; l’amour est le commun des mortels. L’amour est à l’origine de toutes les bonnes actions ! Aussi la Saint-Valentin est-elle là à nous rappeler la nécessité d’aimer autrui comme on aime soi-même, dans un monde plein d’atrocités, de souffrances et de haine ! Fêter l’amour une fois par an en vaut bien la chandelle ! N’est-ce pas l’occasion pour les hommes de déclarer leur flamme aux femmes et vice versa.

Les soucis quotidiens et les tracas de la vie courante font souvent oublier d’exprimer nos sentiments aux êtres les plus chers. En effet, aujourd’hui, les gens ont plus besoin de s’aimer les uns les autres que toute autre époque, vu la conjoncture actuelle où nous vivons qui présage un avenir peu rassurant ! Qu’avez-vous préparé à cette occasion pour votre conjoint ? Qu’allez-vous lui offrir ? Où est ce que vous allez le célébrer ? Ce sont ces questions que nous entendons chaque année, et durant cette même période. C’est que la Saint-Valentin est devenue un vrai phénomène en Tunisie et semble s’ancrer progressivement dans notre culture !

Apprendre à aimer

Depuis des siècles et jusqu’à nos jours, L’Amour est le thème principal de la poésie arabe depuis Antar de l’époque antéislamique jusqu’à Nizar Kabani des temps modernes ! C’est que certaines gens de chez nous considèrent encore l’amour, ce sentiment noble, comme tabou, comme une affaire tout à fait discrète, tout à fait personnelle, dont on ne doit pas parler en public !

Il est donc normal qu’un intérêt soit accordé à cette fête dans nos contrées. Nous avons besoin d’Amour (le mot mérite aussi le port de la majuscule !). Nos enfants et nos jeunes doivent apprendre à aimer ! Comme c’est réjouissant de voir des écoliers, des collégiens et des lycéens se féliciter de cette fête en échangeant d’aimables paroles ; cela vaut beaucoup mieux que les « gros mots » qu’ils sont habitués à proférer avec toute effronterie. Que c’est réconfortant de voir nos jeunes, pour joindre le geste à la parole, s’offrir des fleurs, des cadeaux à cette occasion, c’est toujours mieux que d’échanger des coups de poings ou de commettre des actes de violence comme on en voit souvent dans nos écoles ! Comme c’est beau d’offrir des bouquets de fleurs à ses parents, à sa fiancée, à ses êtres chers, à l’occasion de cette fête ! Un témoignage d’amour à cette occasion pourrait venir d’un enfant à sa mère, à sa sœur, d’un élève à son (sa) camarade, à sa maîtresse ou à son professeur. Pourquoi nos hommes n’allument des bougies qu’en cas de panne électrique, les bougies s’allument aussi de temps en temps pour un dîner intime aux chandelles !

Commerçants et fleuristes au rendez-vous

Et comme nos fêtes sont synonymes de dépenses, la Saint-Valentin ne fait pas l’exception ! Voilà que depuis quelques jours nos commerçants de cadeaux se sont bien préparés pour ce 14 février afin de satisfaire leurs clients qui viendront choisir leurs présents à offrir aux êtres les plus chers et aux élus de leurs cœurs, en signe d’amour, de tendresse, de fidélité ou tout simplement d’amitié et de fraternité. Ils ont déjà concocté une gamme de cadeaux « Spécial St Valentin ». Certaines boutiques spécialisées en cadeaux sont prises d’assaut par toutes ces personnes qui attendent avec impatience cette occasion pour témoigner de leur attachement et leur affection aux êtres bien aimés. A vrai dire, le spectacle est gai dans les magasins qui se bourrent de cadeaux pour la circonstance. Dans les vitrines des magasins, tout renvoie à cette fête, des décorations jusqu’aux articles exposés et le sourire des vendeurs ne manquait pas à cette ambiance joviale.

Du côté des fleuristes, même effervescence, et c’est la fleur rouge, couleur d’amour, qui était la plus demandée. Les restaurants se préparent à leur tour pour ce rendez-vous en proposant un dîner « spécial St Valentin » pour les couples qui, préférant l’intimité aux cadeaux, optent pour un dîner à la chandelle !

Pour ou contre la Saint-Valentin ?

Il est à signaler que les Tunisiens font de cette fête une tradition qui commence à s’ancrer petit à petit dans notre société, malgré une certaine réticence de la part d’une catégorie de gens qui arguent d’un surcroît d’atavisme et de conservatisme pour justifier leur refus à ce genre de fêtes qu’ils considèrent comme étrangères à nos coutumes et à nos mœurs. Les propos qu’on a recueillis auprès des personnes interrogées dénotent cette divergence d’idées concernant la célébration de la Saint valentin.

** Samia, 40 ans, employée de bureau : « Moi, je suis totalement contre. Pourquoi juste un jour pour prouver son amour à l’élu de son cœur ? Quand on aime, on n’a pas besoin d’attendre la Saint- Valentin pour en faire preuve. Et puis, les occasions ne manquent pas chez nous pour offrir des cadeaux à ceux qu’on aime : les fêtes d’anniversaires, une date de mariage, de fiançailles ou un jour de rencontre peuvent être commémorés en couple, les petites attentions entre les amoureux ne se comptent pas et peuvent se faire quotidiennement ! »

** Fatma, 18 ans, lycéenne : « Totalement pour ! J’aurais préféré qu’il y ait deux ou trois fêtes de ce genre chaque année ! Y a-t-il un sentiment plus sublime que celui d’amour dans ce monde ? Si les gens s’aimaient vraiment, il n’y aurait plus de guerre dans ce monde ; c’est la haine, l’égoïsme et l’injustice qui dominent dans ce monde ! La Saint- Valentin est donc un rappel à l’ordre ! Il n’y a que l’amour qui triomphe ! »

** Riadh, 45 ans, professeur : « Ce que je n’aime pas dans cette fête, c’est lorsque l’amour devient une source de profit chez les commerçants qui font de cette fête une occasion pour se remplir les poches. A part cela, l’amour mérite d’être célébré par tous les Tunisiens, surtout pour nos hommes qui manquent beaucoup de galanterie envers les femmes ; c’est l’occasion pour qu’ils témoignent de leur passion à leur bien-aimée ! Et puis, nous avons vraiment besoin d’aimer et d’être aimé surtout en ces temps de crises. »

** Jamel, 22 ans, étudiant : « Je ne suis pas favorable à l’idée de célébrer cette fête. D’abord, parce que les cadeaux ne changent pas grand-chose dans les sentiments des amoureux ; quand on s’aime, c’est pour toujours et pour le pire et le meilleur ! Ensuite, cette fête n’est pas de chez nous, elle ne mérite pas qu’on la célèbre en grande pompe ! »

 Hechmi KHALLADI