Le marché de l’or en Tunisie fait face à des défis sans précédent, exacerbés par une série de facteurs économiques et structurels. Alors que la période estivale coïncide traditionnellement avec une hausse des ventes de bijoux, notamment en raison des mariages, les acteurs du secteur constatent une chute inquiétante de la demande. Cette situation, qui pourrait avoir des conséquences graves pour l’industrie de la bijouterie, soulève des inquiétudes quant à l’avenir de ce marché emblématique.
La période estivale, qui devrait normalement stimuler l’achat de bijoux, est marquée par une forte baisse des ventes. Selon les déclarations de Hatem Ben Youssef, président de la Chambre nationale des bijoutiers, les ventes ont chuté de manière alarmante, atteignant une réduction de 50 %. Ce constat révèle une tendance inquiétante qui pourrait compromettre la pérennité de nombreux artisans et commerçants.
Les causes économiques
L’une des principales raisons évoquées pour expliquer cette baisse de la demande est l’envolée des prix de l’or sur les marchés internationaux. En effet, le coût du gramme d’or a franchi la barre des 300 dinars, rendant l’achat de bijoux prohibitif pour une partie significative de la population. Cette hausse des prix est d’autant plus problématique dans un contexte où le dinar tunisien continue de se déprécier, ce qui affecte directement le pouvoir d’achat des consommateurs.
Cette situation économique difficile est aggravée par l’inflation, qui érode davantage le pouvoir d’achat des ménages. Les Tunisiens, face à cette pression économique croissante, semblent privilégier des dépenses essentielles, reléguant l’achat de bijoux au second plan.
Des défaillances structurelles
Outre les facteurs économiques, des problèmes structurels au sein du marché de l’or en Tunisie sont également pointés du doigt. Le manque de réglementation adéquate a créé un environnement commercial peu transparent et peu sûr. Ben Youssef souligne que l’encadrement actuel ne permet pas de garantir un circuit commercial fiable, ce qui nuit à la confiance des consommateurs.
Un des signaux les plus préoccupants est la fermeture de la Dar Ettabaa, le laboratoire national responsable du contrôle qualité et du marquage officiel de l’or. Cette décision a conduit à une situation où seuls les lingots émis par la Banque centrale sont encore vérifiés, laissant de nombreuses interrogations sur la traçabilité des bijoux non certifiés et de l’or recyclé. Les consommateurs pourraient ainsi se retrouver dans l’incertitude quant à l’authenticité et la provenance des produits qu’ils achètent.
Face à cette crise, Hatem Ben Youssef appelle à des réformes urgentes pour revitaliser le marché de l’or en Tunisie. Selon lui, il est essentiel de revoir la réglementation en vigueur, de rétablir un organisme de certification fiable et d’étudier des solutions pour atténuer les effets des fluctuations internationales sur les prix locaux. Ces mesures pourraient contribuer à rétablir la confiance des consommateurs et à stimuler la demande.
Perspectives d’avenir
Pour le marché de l’or, l’avenir semble incertain. La combinaison de la hausse des prix, de la dépréciation du dinar et des défaillances structurelles posent des défis importants. Les artisans et commerçants doivent s’adapter à un environnement en constante évolution, tout en cherchant des solutions pour attirer de nouveau les consommateurs.
Il est également crucial que les autorités prennent conscience de l’importance de ce secteur pour l’économie nationale et agissent rapidement pour mettre en place des mesures de soutien. La revitalisation du marché de l’or peut non seulement bénéficier aux bijoutiers, mais également contribuer à la stabilité économique du pays dans son ensemble.
La situation actuelle du marché de l’or est le reflet d’une conjoncture économique complexe, où les défis structurels se mêlent à des facteurs externes. Alors que la période des mariages, traditionnellement propice à l’achat de bijoux, est marquée par une chute de la demande, il devient impératif d’agir rapidement. En mettant en place des réformes adéquates, il est possible de redonner un souffle nouveau au secteur de la bijouterie tunisienne, garantissant ainsi son avenir et la satisfaction des consommateurs.
Leila SELMI