Le département de la protection sociale et du secteur non organisé de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a déposé un préavis de grève pour les 8 et 9 juillet prochain dans l’ensemble des sites de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG), en signe de protestation contre le refus de la Direction générale de cette entreprise publique de satisfaire les revendications des salariés.
Les syndicats des employés et de la CPG et de la Société tunisienne de transport des produits miniers (STTPM), une compagnie à participation publique créée en 2011 suite à l’annulation de la sous-traitance dans le secteur du transport du phosphate, avaient déjà menacé, le 16 juin dernier, de recourir à des mouvements de protestation, dont une grève générale, en signe de protestation contre une « détérioration sans précédent » des conditions de travail dans le secteur.
Ils ont notamment fait état d’un vieillissement des équipements de travail et de la non-application des mesures de sécurité professionnelle qui transforment l’environnement de travail en une « zone de mort lente », selon leurs dires.
Les syndicats ont également exprimé leur refus catégorique de charger des entreprises privées de transporter le minerai brut, estimant que cela représente un « stratagème visant à privatiser la STTPM, au lieu de la sauver en investissant dans les infrastructures et la maintenance du matériel roulant ».
Au rang des revendications urgentes, les syndicats des employés de la CPG et de la STTPM réclament la revalorisation de la prime compensatoire, l’augmentation des montants de la prime de fin d’année et de la gratification annuelle accordée aux salariés à l’occasion de la rentrée scolaire avec leur indexation sur le salaire brut mensuel, la réintégration des travailleurs licenciés, la révision à la hausse du montant et du nombre des avances exceptionnelles, ainsi que la généralisation de la prime de risque à l’ensemble des services de la CPG.
Rassemblement de protestation
Le versement des arriérés de primes au titre des années 2019 et 2023, l’intégration des majorations salariales relatives aux périodes 2008-2011 et 2014-2106 dans le salaire de base, l’attribution des quotas de prêts du fonds social au titre des années 2023-2025 et le décaissement des primes de « travail à forfait » (accord par lequel est stipulé une rémunération fixée d’avance et de façon invariable pour l’exécution de certains travaux ou la fourniture de certains services) et des gratifications de fin de service figurent par ailleurs parmi les principales revendications.
Outre la grève prévue les 8 et 9 juillet, les syndicats rattachés à l’UGTT prévoient d’organiser des rassemblements de protestation devant le ministère de l’Energie et des mines, ainsi qu’une « journée de colère » à la Place du gouvernement à la Kasbah et une conférence de presse se tiendra prochainement pour mettre les pleins feux sur la « mauvaise gestion » de la CPG et de la STTPM.
Ce regain de tensions sociales risque de perturber les activités de production du phosphate au niveau de la CPG, qui figure parmi les principaux producteurs de phosphate au monde et compte plusieurs sites, notamment à Métlaoui, Redeyef, Om Laârayes et Mdhilla.
Cette compagnie détenue à hauteur de plus de 99% par l’Etat a annoncé une production de 3,03 millions de tonnes de phosphate commercial en 2024, contre 2,9 millions de tonnes en 2023.
Installée depuis 1897 au milieu des gisements de phosphate découverts par le Français Philippe Thomas, vétérinaire militaire et géologue amateur, la CPG constitue quasiment l’unique mamelle nourricière du bassin minier. Jusqu’ à la fin des années 1980, elle gérait les lignes de chemin de fer, assurait la distribution de l’eau, du gaz et de l’électricité, et prenait en charge les soins et l’éducation des enfants.
Aujourd’hui, cette compagnie ne fournit quasiment plus de « services sociaux » et ne recrute qu’au compte-gouttes, en raison de recrutements massifs et du blocage de la production qui ont eu lieu durant la décennie ayant suivi la révolution.
Walid KHEFIFI