«Selon les dernières données disponibles, environ 16 000 citoyens tunisiens ont exprimé leur volonté de donner leurs organes, mention qui figure désormais sur leur carte d’identité nationale», a révélé Jalel Zayadi, directeur général du Centre national pour la promotion de la transplantation d’organes (CNPTO).
Lors d’une intervention sur les ondes de la Radio nationale, Jalel Zayadi a exprimé que, malgré cet engagement prometteur, seuls 10 à 15 cas répondent aux conditions strictes requises pour que le don d’organes puisse effectivement avoir lieu.
«Ces critères incluent notamment un décès survenu en état de mort cérébrale, l’absence de maladies infectieuses transmissibles et une mort constatée en milieu hospitalier», a-t-il précisé, mettant en lumière les limites structurelles auxquelles le système est confronté.
La Tunisie : pionnière en Afrique et dans le monde arabe dans la transplantation d’organes
Dans ce cadre, le ministre de la Santé, Mustapha Ferjani, a rappelé que la Tunisie a été l’un des premiers pays arabes et africains à intégrer le système de transplantation d’organes dès les années 1980. «Aujourd’hui, l’enjeu est encore plus grand : il s’agit de retrouver notre position de pionnier et de renforcer la culture du don pour sauver davantage de vies», a-t-il déclaré lors d’une séance de travail tenue au ministère de la Santé.
Pour concrétiser cette ambition, un plan d’action structurant a été mis en place afin de relancer la transplantation. Cette réunion stratégique a rassemblé plusieurs médecins spécialistes, ainsi que les responsables du CNPTO. Elle visait à faire le point sur l’état d’avancement du programme national et à définir les leviers prioritaires de son développement.
Parmi les mesures concrètes adoptées figure le renforcement des équipes médicales, à travers la dotation en équipements adaptés et le recrutement de ressources humaines qualifiées, afin d’améliorer les conditions de travail et garantir la qualité des interventions. En parallèle, la création d’une plateforme numérique nationale a été décidée pour assurer une meilleure coordination entre les différents intervenants du secteur.
Toujours dans une optique de modernisation, la numérisation complète des étapes du processus de transplantation a été retenue comme axe prioritaire. Cette digitalisation permettra d’améliorer la traçabilité des opérations et d’optimiser leur efficacité. Le soutien à la recherche scientifique et à la formation médicale a également été réaffirmé comme un pilier essentiel pour garantir un développement durable de cette filière hautement spécialisée.
Par ailleurs, la formation généralisée des cadres de santé à la pratique de la transplantation sera accompagnée d’une campagne de sensibilisation nationale visant à ancrer la culture du don d’organes dans les mentalités. Il s’agit là d’un acte profondément humain et solidaire, porteur d’espoir et de vie pour des milliers de patients en attente.
Dans la continuité de ces efforts, le Centre national pour la promotion de la transplantation d’organes a réaffirmé, dans un communiqué, son engagement à intensifier ses actions de sensibilisation et de mobilisation, dans le but d’augmenter le nombre de donneurs et de sauver davantage de malades atteints d’insuffisance organique terminale.
Le traitement en urgence des cas de mort cérébrale, ainsi que le dialogue mené avec les familles des défunts, figurent parmi les missions clés du Centre. Celui-ci veille également à garantir une coordination étroite entre les équipes médicales et administratives, afin d’assurer le transfert des organes dans des délais optimaux – une condition essentielle à la réussite de ces opérations sensibles.
Quatre vies sauvées grâce à un seul donneur
La portée vitale de cette solidarité a été récemment illustrée par une opération exemplaire. La dernière intervention réalisée en juillet 2025 a permis de sauver la vie à quatre patients en attente urgente de transplantation, grâce au don d’un seul individu en état de mort cérébrale.
Le ministère de la Santé a précisé que cette réussite a été rendue possible grâce à une coordination rigoureuse entre les équipes médicales des hôpitaux de La Rabta, Mongi Slim (La Marsa), Charles Nicolle et Fattouma Bourguiba (Monastir), sous la supervision du Centre national pour la promotion de la transplantation d’organes.
«Cet accomplissement ne constitue pas seulement une prouesse médicale, mais aussi une illustration concrète des valeurs de solidarité et de générosité qui caractérisent le peuple tunisien. En acceptant le don, la famille du défunt a offert une nouvelle chance de vie à quatre personnes, dans un moment profondément humain et chargé d’émotion», a souligné le ministère dans son communiqué.
Liste d’attente pour transplantation d’organes : plus de 1 700 patients
Cependant, malgré ces succès encourageants, une demande toujours croissante fait peser une pression constante sur le système. «La liste d’attente reste préoccupante. Actuellement, 1 700 patients attendent une transplantation de rein, 40 une transplantation de cœur, et entre 40 et 50 une transplantation de foie», a affirmé le directeur général du Centre national pour la promotion de la transplantation d’organes.
Dr Zayadi a rappelé que la sélection des receveurs repose exclusivement sur un système d’information numérique. Celui-ci prend en compte des critères stricts tels que la compatibilité des tissus, le groupe sanguin et la taille de l’organe, garantissant ainsi une répartition équitable et à l’abri de toute intervention humaine ou favoritisme.
Cinq hôpitaux agréés
«Les opérations de transplantation d’organes sont exclusivement réalisées au Centre national de transplantation d’organes, en coordination avec l’ensemble des équipes médicales», a expliqué Jalel Zayadi.
Il a ainsi précisé que le transport des organes donnés se fait sous escorte sécuritaire, et qu’un hélicoptère est mis à disposition si nécessaire, notamment lorsque la distance entre le donneur et le receveur est importante.
Par ailleurs, il a souligné que seules cinq structures hospitalières en Tunisie sont autorisées à effectuer des transplantations. Il a également rappelé que la loi interdit la réalisation d’opérations de transplantation dans les cliniques privées, à l’exception des transplantations de cornée.
Nouha Mainsi
