La Tunisie attire chaque année des millions de visiteurs. Pourtant, derrière cette carte postale idyllique se cache une réalité alarmante : l’accumulation massive de déchets abandonnés par les usagers eux-mêmes. Canettes, bouteilles en plastique, emballages alimentaires, restes de pique-nique, mégots de cigarettes… Le littoral tunisien est de plus en plus victime d’un comportement irresponsable qui ternit l’image du pays et menace gravement son environnement. Avec l’arrivée des beaux jours, les plages se remplissent de familles, de jeunes et de touristes venus profiter du soleil. Malheureusement, l’afflux de visiteurs s’accompagne d’une explosion de détritus laissés sur le sable ou jetés directement dans la mer.
Les opérations de nettoyage organisées par les municipalités ou les associations locales permettent certes de réduire temporairement les dégâts, mais elles ne suffisent pas à contenir un phénomène qui s’amplifie d’année en année. Le constat est implacable : dans certaines zones, la quantité de déchets laissés en une seule journée suffit à recouvrir plusieurs dizaines de mètres de rivage. Ce problème n’est pas seulement esthétique, il affecte directement la qualité de l’eau, met en danger la faune marine et compromet la biodiversité.
Des conséquences désastreuses pour l’environnement
Les déchets abandonnés sur les plages ne disparaissent pas d’eux-mêmes. Beaucoup sont emportés par le vent ou par les vagues et finissent dans la mer, où ils se dégradent très lentement, libérant des substances nocives. Les plastiques, par exemple, se fragmentent en microplastiques ingérés par les poissons et autres organismes marins. Ces pollutions se répercutent tout au long de la chaîne alimentaire, finissant parfois dans l’assiette des consommateurs. Les déchets peuvent aussi blesser ou tuer des animaux marins, comme les tortues ou les oiseaux de mer, qui les confondent avec de la nourriture. Au-delà de l’impact écologique, ce fléau met également en péril la santé publique.
Et puis, les plages constituent l’un de ses principaux atouts, et leur dégradation pourrait avoir un impact économique considérable. Les visiteurs étrangers, séduits par les brochures montrant un littoral immaculé, sont souvent choqués de découvrir des rivages jonchés d’ordures. Les photos circulant sur les réseaux sociaux, montrant des plages envahies par les déchets, nuisent à la réputation du pays et peuvent décourager de futurs visiteurs. Dans un contexte de concurrence internationale accrue, la propreté du littoral devient un enjeu stratégique majeur.
Les efforts existants et leurs limites
Certes, des campagnes de sensibilisation et de nettoyage sont régulièrement organisées par des associations, des clubs de plongée ou des groupes de citoyens. Les municipalités déploient également des moyens pour entretenir les plages, notamment en haute saison. Cependant, ces initiatives restent insuffisantes face à l’ampleur du problème.
Le manque de poubelles sur certaines plages, l’insuffisance des patrouilles de surveillance et surtout l’absence de sanctions réelles contre les contrevenants contribuent à la persistance du phénomène. Sans un changement profond des comportements et un engagement plus fort des autorités, la situation risque de se détériorer davantage.
Quel rôle pour l’État et les collectivités ?
La préservation des plages nécessite une action coordonnée et déterminée. L’État, à travers ses institutions, doit renforcer la législation sur la protection du littoral et veiller à son application effective. Des contrôles plus fréquents et des amendes dissuasives pourraient réduire l’incivisme. Les municipalités ont, elles aussi, un rôle clé à jouer en assurant un ramassage régulier des déchets, en installant des infrastructures adaptées et en travaillant main dans la main avec les associations locales. Mais au-delà des moyens matériels, c’est un travail de sensibilisation à long terme qui s’impose, afin que les citoyens prennent conscience que leur comportement individuel a un impact direct sur la beauté et la santé de leur environnement.
Une responsabilité collective
Il serait injuste de faire porter l’entière responsabilité sur les seules autorités. La propreté des plages dépend avant tout du sens civique des usagers. Chaque geste compte : ramasser ses déchets, utiliser les poubelles, réduire sa consommation de plastique, participer aux opérations de nettoyage… autant d’actions simples qui, multipliées par des milliers de personnes, peuvent faire une réelle différence. La protection des plages ne doit pas être considérée comme une contrainte, mais comme un devoir collectif envers les générations futures. Préserver ce patrimoine naturel, c’est préserver l’identité et l’attractivité du pays. Si chacun prend conscience de sa part de responsabilité, il est encore possible de sauver ce joyau menacé.
Leila SELMI
