Il arrive parfois que les sommets se choisissent eux-mêmes un enfant. Non pas un fils des vallées escarpées, ni un héritier des neiges éternelles, mais un garçon venu du plat pays, d’un Sud où la mer respire à niveau zéro et où la chaleur ne connaît aucune trêve. Cette semaine, Asad Ali Memon est en visite en Tunisie, et pour célébrer son exploit exceptionnel, l’ambassade du Pakistan à Tunis a organisé une réception culturelle rassemblant diplomates, amateurs de montagne et passionnés de cultures du monde. Plus qu’un simple hommage sportif, la soirée s’inscrivait dans une véritable démarche culturelle et humaine, un dialogue entre nations et une célébration des valeurs universelles : le courage, la persévérance et l’inspiration.
« Récemment, il y a eu un nombre impressionnant de jeunes Pakistanais qui ont su conquérir les plus hauts sommets du monde, » a déclaré l’ambassadeur du Pakistan en Tunisie, ouvrant la réception. « Et Asad est l’un d’eux. Il a fait l’Histoire en complétant le prestigieux Seven Summits Challenge après avoir atteint le sommet du Puncak Jaya, en Océanie. Il est avec nous ce soir. »
De la mer aux glaciers : un destin inattendu
Asad n’est ni fils de mécène ni protégé d’académie sportive. Il est né dans un environnement atypique pour un futur alpiniste : les plaines chaudes et humides du sud du Pakistan, là où le soleil règne toute l’année, et où les montagnes semblent être un rêve lointain. Quarante degrés à l’ombre, des plages, des vagues, mais aucun sommet enneigé à l’horizon.
Et pourtant, ce jeune homme a choisi de défier l’extrême. Là où la vie semblait facile et la chaleur constante, il a cherché le froid, l’altitude, le vertige. Là où les températures plongent à –40°C, où l’air se raréfie et où chaque pas arrache un souffle.
« Il a gravi une montagne par an et n’a échoué à aucune tentative, » a rappelé l’ambassadeur. « C’est un exploit unique, surtout pour un jeune homme aux moyens financiers limités… Mais sa confiance, son courage et sa volonté d’acier lui ont permis de réaliser des miracles. »
Son odyssée commence en 2019 sur le Mont Elbrouz, en Europe. Puis les sommets s’enchaînent comme les chapitres d’un roman d’aventure : Kilimandjaro, Aconcagua, Denali, Everest, Vinson, et enfin Puncak Jaya, en Indonésie, ultime étape de son légendaire Seven Summits Challenge.
À seulement 27 ans, Asad devient le troisième Pakistanais à accomplir cet exploit, rejoignant Samina Baig et Mirza Ali Baig dans ce panthéon de l’alpinisme. Une prouesse qui dépasse le sport : elle est un symbole d’audace, d’endurance et de rêves incarnés.
Le Pakistan, royaume des géants de pierre
L’ambassadeur a tenu à rappeler avec émotion : « Le Pakistan est béni par certaines des plus magnifiques chaînes de montagnes du monde – le Karakoram, l’Himalaya, l’Hindu Kush… Nous abritons cinq des quatorze sommets de plus de 8 000 mètres, dont le majestueux K2. »
Au-delà de la géographie, il évoque l’Alpine Club of Pakistan, fondé en 1974, qui accompagne et forme les passionnés de montagne. Ces institutions ne transmettent pas seulement des techniques, mais des valeurs : la patience, le respect de la nature, la persévérance et l’amour des grands espaces.
Une réception culturelle : Tunisie et Pakistan, un dialogue par les sommets
La réception à Tunis n’était pas simplement un hommage. C’était un rendez-vous culturel, une célébration du lien entre deux pays, de l’échange de récits et de rêves. Les invités ont partagé avec Asad l’admiration pour les montagnes, mais aussi pour les histoires humaines qui s’y cachent : l’histoire d’un garçon de la mer devenu maître des neiges, d’un jeune homme qui transforme la géographie en symbole de courage universel.
L’ambassadeur conclut la soirée avec ces mots : « Merci pour votre présence. J’invite maintenant M. Asad Ali Memon à partager son expérience. »
Puis Asad se lève, humble, les yeux reflétant la lumière des glaciers et l’intensité des vents, rappelant à chacun que les véritables sommets ne se gravissent pas seulement avec les jambes, mais avec le cœur.
Une leçon universelle
Depuis le rivage où il est né jusqu’aux nuages où il se tient aujourd’hui, Asad Ali Memon nous enseigne que la grandeur est d’abord intérieure. Sa vie est un appel à dépasser les limites, à franchir les frontières, à gravir nos propres montagnes, qu’elles soient de glace, de pierre ou d’ombre.
Et ce soir, à Tunis, entre diplomatie, culture et admiration, le monde entier pouvait sentir ce souffle : celui d’un jeune homme qui a fait de sa vie un sommet, et de ses rêves, une légende.
Mona BEN GAMRA
