Attention, l’eau minérale, modérément refroidie, aide à se rafraîchir, surtout en pleine canicule, mais il faut savoir où acheter sa bouteille et quand éviter d’en prendre car, malheureusement, l’exposition de cette eau aux rayons solaires est un fait «toléré» et qui passe inaperçu alors que ses conséquences pourraient être fâcheuses.
Entre le citoyen tunisien et l’eau minérale, le grand amour n’a réellement vu le jour que depuis près d’une vingtaine d’années. Ce phénomène s’est davantage amplifié après 2011 lorsque l’eau de robinet a commencé à battre de l’aile, de manière à faire fuir les consommateurs ( qui en ont les moyens) vers les eaux minérales produites par les entreprises privées dont le nombre n’a fait que se multiplier, puisqu’il dépasse, à l’heure actuelle, les vingt marques après des décennies qui ont vu trois marques faire la loi, toutes détenues par une société publique unique.
Il faut également savoir qu’en dépit d’une superficie étroite, la Tunisie se prévaut d’un potentiel considérable en eaux thermo-minérales. Bien logée dans le palmarès des plus grands consommateurs d’eau minérale dans le monde, elle est classée, selon des sources officielles, 4e à l’échelle mondiale.
Actuellement, près d’une trentaine d’unités de production situées dans 12 gouvernorats, produisent plus de 364.000 bouteilles par heure, emploient environ 3000 personnes, et génèrent un chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 637 millions de dinars.
La consommation totale d’eau minérale a atteint le chiffre de 2.70 milliards de litres correspondant à environ 1 milliard de bouteilles à diverses contenances de 0,33 cl, 0,5 l, 0,75 l, 1 l, 1,5 l ,2 l, 6 l et 19 litres, soit une moyenne annuelle de 300 litres par personne en 2024 contre 225 litres en 2020, 44 litres en 2007 et 12 litres en 1995.
Profusion de marques et concurrence
Dès lors, le marché s’est ouvert à une grande concurrence. Les eaux minérales sont vendues par des sociétés ayant obtenu un agrément ministériel (conformément à la loi de 1993) et sont contrôlées par l’Office du thermalisme tunisien. Le prix de vente comprend une taxe de 18% dite «taxe d’emballage». Les sociétés gèrent des installations de captage des eaux (source ou forage) et le plus souvent des usines de conditionnement.
C’est dire que du côté hygiène, on peut avancer que ce produit est protégé et sous contrôle grâce aux dispositifs mis en place pour analyser et vérifier la qualité des eaux et des emballages.
Si la qualité est étroitement surveillée et assurée, c’est au niveau des points de vente que les choses se compliquent.
Il suffit de faire un tour du côté des petites épiceries ou des petits revendeurs d’eau pour s’arrêter devant un désolant constat : des centaines, sinon des milliers de bouteilles sont exposées en dehors du local commercial, sous un soleil de plomb. Le plus curieux, c’est que beaucoup de citoyens ne s’en inquiètent pas et continuent à acheter de l’eau même chauffée par les rayons solaires.
Attention, ça peut toucher à la santé
Certes, les conséquences pour la santé du consommateur ne sont pas immédiates et directement sensibles, mais il va falloir faire beaucoup attention.
Une bouteille d’eau minérale exposée au soleil ne présente généralement pas de danger immédiat pour la santé, mais son goût et son apparence peuvent être altérés. Il est recommandé de la conserver à l’abri de la lumière et de la chaleur pour préserver sa qualité gustative.
Le plastique des bouteilles d’eau (PET) est conçu pour être neutre .Toutefois, la chaleur peut modifier la composition de l’eau, notamment la dissolution des minéraux, entraînant un dépôt blanc au fond de la bouteille et un changement de goût.
De ce fait, il est conseillé de conserver les bouteilles d’eau à l’abri de la lumière et de la chaleur pour éviter toute altération du goût et des minéraux. De même, les bouteilles entamées sont plus sensibles à la prolifération bactérienne, surtout si elles sont exposées à la chaleur. Il est recommandé de les consommer rapidement après ouverture.
En tout cas, une exposition prolongée à la chaleur, surtout si la bouteille est entamée, peut potentiellement favoriser la prolifération bactérienne. Dans ce cas, il est préférable de ne pas consommer l’eau.
D’autres experts voient les choses de manière plus inquiétante, comme ceux de l’Instance nationale de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (Insspa) qui multiplient les actions de contrôle en prenant en compte les conditions de transport et de stockage des bouteilles d’eau.
Migration chimique
«Le risque de migration chimique de l’emballage vers le produit existe et il doit être pris en considération et prévenu via les mesures de précautions et les règles sanitaires spécifiques. Certes, nous procédons à plusieurs essais dans les laboratoires pour tester la fiabilité de la qualité du plastique utilisé dans l’emballage de l’eau, sauf que tout risque de migration chimique nécessite de redoubler d’efforts afin de l’éviter», explique Mohamed Rebhi, président de l’Insspa.
Cela dit, le mot d’ordre demeure, indéniablement, celui de la sensibilisation des commerçants et des transporteurs et de la prise de connaissance du consommateur du danger qu’il risque d’encourir s’il prenait à la légère les conditions de transport, de stockage ou encore d’exposition de l’eau emballée.
A un autre niveau, les services de contrôle de l’hygiène doivent être plus actifs pour sensibiliser les commerçants et les sanctionner s’ils continuent à exposer de l’eau minérale au soleil.
Certes, les autorités compétentes ont lancé une campagne de sensibilisation à ce propos, mais c’est sur le terrain que tout doit être fait et mis sous contrôle.
Kamel ZAIEM
