Encore un changement à la tête de la Pharmacie centrale de Tunisie (PCT), là où diverses thérapies ont été testées sans parvenir à éradiquer un mal qui persiste depuis des années. La nomination d’un nouveau PDG va-t-il permettre de remettre cette entreprise publique sur les rails et de résoudre une bonne partie de ses problèmes ? Nous l’espérons bien, même si la mission de la nouvelle première responsable ne sera sûrement pas une promenade de santé…
L’information n’a pas manqué de surprendre. Chokri Hammouda, le PDG de la PCT vient d’être déchargé de ses fonctions après un bref bail de dix mois. Le Journal officiel de la République tunisienne (JORT) du 9 octobre 2025, a juste annoncé le limogeage de ce responsable et la nomination d’ Amel Fattoum à sa place .
Pourtant, il y a cinq mois, la situation donnait l’impression de s’améliorer puisque Chokri Hammouda avait révélé, lors d’une rencontre avec les médias, que la pénurie de médicaments avait nettement baissé et que les dettes de la PCT ont diminué. Il avait, alors, affirmé que cette amélioration était due à l’adoption de plusieurs mesures de redressement financier et logistique par l’établissement public.
A cette date, la Pharmacie centrale détenait des créances d’un montant total de 1 442 millions de dinars auprès des hôpitaux publics et des caisses sociales alors qu’elle faisait face, de son côté, à une dette estimée à 1 300 millions de dinars. Cette dette est répartie presque également entre la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) et les établissements de santé publics. Une situation qui pèse lourdement sur la capacité de la PCT à maintenir ses approvisionnements et à honorer ses engagements financiers envers les fournisseurs internationaux.
Selon d’autres sources proches de la PCT, cet organisme doit aujourd’hui plus de 600 millions de dinars aux laboratoires internationaux, alors que les délais de paiement atteignent désormais 12 à 13 mois. Ce retard limite les commandes de la PCT, en particulier pour les médicaments non vitaux, réduisant les stocks de certains produits à environ un mois et demi, contre trois mois habituellement. Cette situation génère des pénuries de médicaments, une réalité qui affecte aussi bien les patients que les professionnels de la santé.
Aujourd’hui, Hammouda laisse la place à Amel Fattoum qui, à priori, ne manque ni de compétence ni d’atouts pour faire encore plus et améliorer une situation très délicate. Fattoum, qui est la première femme à occuper ce poste depuis la création de l’institution en 1958, est une ancienne directrice, chargée du Secrétariat permanent de la commission des marchés de la Pharmacie centrale (PCT), ayant une maitrise en Sciences économiques et gestion, et un Master Marketing E-Commerce. Avec son expérience à la tête de la commission des marchés, Fattoum dispose d’un bon profil pour assurer, dans la mesure du possible, qu’aucun médicament ne vienne à disparaître, et que les hôpitaux publics remboursent les dettes inhérentes aux médicaments, qu’ils doivent à la PCT pour qu’elle puisse assurer l’approvisionnement du marché .
Profiter du plan national en attendant d’une manne financière
D’ailleurs, Mme Fattoum pourrait également tirer profit de la récente élaboration, au sein du ministère de la Santé, d’un plan national visant à faire face aux pénuries conjoncturelles de médicaments. Parmi les principales mesures décidées figurent la mise en place d’une plateforme d’alerte précoce à la Pharmacie centrale pour signaler tout risque de rupture, l’obligation pour les fabricants de déclarer régulièrement leurs stocks afin d’éviter les pénuries soudaines, ainsi qu’une coordination anticipée avec les laboratoires en cas de perturbation de la production.
Le plan prévoit également le lancement d’une campagne nationale de sensibilisation à l’utilisation des médicaments génériques, en plus d’un appel adressé aux médecins et pharmaciens à s’appuyer sur les données nationales dans la prescription et à rationaliser les ordonnances.
La nouvelle PDG aura du pain sur la planche pour renverser la vapeur et doter la PCT d’un meilleur équilibre financier qui mettra fin aux nombreuses pénuries de médicaments ? Nous l’espérons bien, mais elle doit être fortement soutenue pour relever ce défi.
Kamel ZAIEM
