C’est déjà la frénésie des habits de l’Aid. Plutôt que de frénésie, terme jadis utilisé pour décrire la ferveur, la fête et la communion, cette année, l’Aid ne sera pas paré de ses plus beaux atours. Avec les surenchères, la vertigineuse tendance inflationniste, habiller son enfant (quelles que soient les bourses, à moins d’habiter les stratosphères), n’est pas seulement un casse-tête. C’est même un drame ravalé, parce que les enfants ne comprennent rien à la conjoncture économique, ni aux magmas des ménages.
Il se trouve ainsi, que la ruée sur la friperie tourne à la compétition et à la course contre la montre. Secteur sinistré lui aussi, la friperie tient la dragée haute au prêt-à-porter et à l’industrie de la chaussure, quoique pour la chaussure précisément, les textes soient flous.
Mais, au-delà des entourloupes, l’habit de l’Aid pour un seul enfant coûterait 250 dinars. Même la défunte classe moyenne n’y parviendra pas.
Mais qu’en est-il des familles nécessiteuses (280mille selon le ministère des Affaires sociales) ? Une aide de 60 dinars ! Même la friperie leur est inaccessible.
Fête morose en vue….
Lundi 2 mai 2022, c’est la date prévue pour être le premier jour de l’Aïd Al Fitr, d’après les prévisions de la société astronomique de Tunisie. Puisque l’observation du croissant du mois de chawwal, au 30 avril courant, serait impossible. En tout cas, c’est au mufti de la République, Othman Battikh de fixer la date exacte. Entre temps, le mufti vient d’annoncer que le montant de « zakat el Fitr », pour cette année est fixé à 1980 millimes en augmentation de 0,23 dinar par rapport au montant fixé une année auparavant. Avec l’avènement de l’aïd, l’augmentation des prix et des tarifs est ressentie partout. Pour le mois de mars 2022, le taux d’inflation tel qu’il est calculé par l’institut national de la Statistique (INS) est de l’ordre de 7,2%. Il dépasse 13% pour les produits alimentaires et avoisine les 15% pour les vêtements et chaussures. Pour le mois courant, les prévisions affichent une augmentation qui dépasse 20% pour les vêtements et chaussures. Avec les derniers ajustements des prix des carburants, les tensions inflationnistes persistent. De telle sorte que le coût des habits de l’aïd dépasse 250 dinars par enfant, d’après Lotfi Riahi, président de l’organisation tunisienne pour informer le consommateur. Pour une famille de 4 enfants, il faudrait 1000 dinars pour l’achat des habits outre les autres dépenses dues aux habitudes de consommations. La mission s’avère impossible. Il suffit au juste d’avoir une idée sur les résultats des soldes d’hiver. Pour cette saison, la chambre syndicale nationale du commerce du prêt-à-porter et des tissus relevant de l’UTICA, évoque une baisse de 50% des ventes en comparaison avec les années précédentes. Conjoncture oblige, les Tunisiens se trouvent dans l’obligation de changer les habitudes de consommations. Aux forceps, les Tunisiens s’adressent aux commerces des friperies qui connaissent à leurs tours une augmentation des prix d’une année à une autre. Sauf que les prix des habits usagés demeurent relativement abordables. Pour la chambre nationale des commerçants de la friperie, relevant également de l’UTICA, l’avènement de l’aïd est marqué cette année par une affluence importante dans les « stands » et autres « boutiques » de friperie. Ladite chambre évoque des prix abordables même pour les familles pauvres, alors qu’une simple tournée aux niveau des zones connues par ses stands de friperie fait apparaître une augmentation des prix. La friperie devient plus chère.
Une aide de 60 dinars …
D’après les informations recueillies, le ministère des Affaires sociales compte distribuer, à partir du lundi prochain, des aides pour 280 000 familles nécessiteuses. C’est à l’occasion de l’aïd que ces familles nécessiteuses vont recevoir un montant de 60 dinars par famille. Ces familles reçoivent du ministère une allocation mensuelle fixée à 200 dinars. Le ministère de tutelle établit une enveloppe de 9 millions de dinars distribués aux familles pauvres tout au long du mois de Ramadan. Ce montant doit être révisé à la hausse d’ici la fin de l’année pour la simple raison que le nombre des familles bénéficiaires de ce programme doit atteindre 310 000 familles. En tout cas, le nombre des familles pauvres, ou encore nécessiteuses en Tunisie, dépasse les 300 000 familles, d’après les chiffres officiels, alors que les données communiquées par la société civile (le FTDES par exemple) disent qu’un tiers de la population tunisienne est pauvre. Pour la simple raison que 4 millions de Tunisiens vivent avec moins de 5 dinars par jour. Techniquement, ces Tunisiens sont considérés comme pauvres d’autant plus que ceux qui vivent avec moins de 3 dinars sont considérés comme extrêmement pauvres. Pour l’Organisation des Nations Unis pour l’Éducation la Science et la Culture (l’Unicef), la Tunisie connaît également le phénomène d’une enfance pauvre. D’après une étude relative à l’analyse de la situation des enfants en Tunisie, le nombre des enfants pauvres risque d’atteindre 900 000 enfants contre environ 700 000 actuellement. En Tunisie, un enfant sur cinq vit dans la pauvreté et le taux de pauvreté des enfants de 21,2%, dépassant de 6 points le taux moyen de pauvreté.
Zied DABBAR