Par Raouf Khalsi
Lundi, donc, la mouture de la troisième constitution de la Tunisie sera soumise à l’appréciation du Président de la république. A son appréciation, ou à son exclusive discrétion ? Toute la question est là. En tous les cas, le Professeur Amine Mahfoudh a déclaré hier que les réquisits de la démocratie y figurent en bonne place. Déclaration sibylline, sans doute, mais qui a le mérite, en peu de mots, de lever un voile de mystère quant à la prétendue tentation absolutiste de Saied. On ne saurait dire qu’elle comportera un package ou, du moins, un assemblage entre la démocratie représentative (c’est-à-dire les partis politiques) et la pyramide inversée, véritable cheval de bataille du Président.
Au demeurant, les quatre petits mots d’Amine Mahfoudh contrastent avec les longs exposés du maître d’œuvre, le doyen Sadok Belaïd. On sait que Sadok Belaïd est un formaliste de premier plan. Il est même porté sur le jeu sémantique, surtout en ce qui concerne les appellations des institutions. Les constitutionnalistes, de par le monde, sont ainsi formatés que chacun d’entre eux s’identifie à un courant de pensée bien précis. Ils peuvent être dans l’exégèse, comme ils peuvent systématiquement ne s’abreuver que dans la sociologie politique. L’un n’exclut pas l’autre. Mais, pour convaincre le Président, il faudra aussi tout assaisonner à ce dont il croit le plus : l’ascèse.
Nous sommes néanmoins à un tournant historique dans l’histoire de cette Nation, de ce peuple qui se prononcera et que Saied appelle à se prendre en mains.
Même si tout s’est fait à la hâte ; même si, hier, à Dar Dhiafa, les deux commissions ont tenu une réunion marathonienne, il est clair que les échéances seront respectées. Le 25 juillet, ce sera le référendum, le 17 décembre les Législatives : l’essentiel ne dépendra pas de Saied, ni de la commission consultative. Mais bel et bien des instances qui vont piloter ces opérations.
Comme pour faire écho aux propos d’Amine Mahfoudh, Farouk Bouaskar, président de l’ISIE a déclaré à la radio nationale que son instance « n’est ni un tribunal, ni un organe du Ministère public. » Il ne sera pas un tribunal de l’inquisition et, ajoute-t-il, « personne ne sera tenu de justifier ses choix politiques. » Pas de limitations non plus aux accréditations. En tous les cas, il a bien réussi à rassurer Natasha Franceschi, la chargée d’affaires de l’Ambassade américaine en Tunisie. Il lui a dit ce qu’elle voulait formellement entendre : « Intégrité, indépendance, transparence » …Avec l’Oncle Sam, il ne serait pas indifférent de faire dans la pédagogie. Même si les Américains ne sont en rien un modèle du genre.