«Le président de la République a affirmé son opposition à la privatisation des entreprises publiques et à la levée des subventions aux produits de base. Naturellement, nous saluons cette position, mais force est cependant de souligner une duplicité au niveau du pouvoir exécutif vu que chaque ministre joue sa propre partition. Certains ministres évoquent des réformes douloureuses alors que d’autres parlent d’entreprises publiques non stratégiques à céder et de l’orientation des subventions vers leurs ayants droit. Comment une personne dotée d’un minimum de bons sens, pourrait comprendre ou accepter cette inconséquence et ce véritable méli-mélo ! » ;
Termes lourds, utilisés par le secrétaire général de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), Noureddine Taboubi et qui a fustigé les dissonances perceptibles entre le président et le gouvernement au sujet des grandes réformes comme la privatisation des entreprises publiques et la levée des subventions, tout en appelant à un remaniement ministériel.
C’était à l’occasion d’un discours prononcé à Tunis devant des milliers de syndicalistes réunis en commémoration du 70ème anniversaire de l’assassinat du syndicaliste et nationaliste Farhat Hached. Et d’ajouter : « le président dit une chose et le ministre dit son contraire. Mais cette tromperie et ce genre de ruses ne passeront pas. Certains disent que le pouvoir actuel a remis l’UGTT à se place et l’a placé dans le carré où elle devrait être. Je leur dis que ni ce régime, ni aucun autre n’est capable de fixer le champ d’action du mouvement syndical tunisien ».
Le responsable syndical a indiqué dans ce cadre que l’UGTT est une force de proposition, un élément d’équilibre et un acteur principal dans le processus des réformes économiques, politiques et sociales », indiquant que les campagnes de dénigrement et de diabolisation ne l’empêcheront jamais de tenir ses engagements envers le peuple.
Le gouvernement reproduit les mêmes erreurs que ses prédécesseurs
Il a également fait savoir que la centrale syndicale n’accepte plus le processus politique actuel qu’elle avait pourtant soutenu quand le président de la République a suspendu l’Assemblée des représentants du peuple et congédié le gouvernement en juillet 2021.
« Nous refusons un retour à l’avant 25 juillet (2021), mais nous n’acceptons plus également le processus actuel marqué par le flou et la concentration du pouvoir entre les mains d’un seul individu », a-t-il dit, tout en mettant en garde contre des mauvaises surprises que pourraient réserver les prochains mois en ce qui concerne l’avenir de la Tunisie, des générations futures et de la démocratie.
M.Taboubi a également critique vertement le rendement du gouvernement de Najla Bouden, estimant qu’il manque de vision et ne fait que reproduire les mêmes erreurs de ses prédécesseurs ont choisissant les solutions de facilité et en copiant des modèles désuets qui ont prouvé leur échec.
Il a aussi plaidé pour un remaniement ministériel pour « sauver ce qui peut l’être », notant que la Tunisie va vers des élections « incolores inodores et insipides qui sont le résultat d’une Constitution dont l’évaporation et qui n’a pas été approuvée par la majorité des citoyens », en allusion aux élections législatives du 17 décembre boycottées par une partie des partis et politiques et très critiqués par la société civile.
« La centrale syndicale a alerté sur cette situation dès le début du processus, mais ses mises en garde n’ont jamais été prises en considération. Au contraire, nos appels à des solutions basées sur une approche participative ont provoqué des campagnes de diabolisation de l’organisation ouvrière », a-t-il déploré, regrettant «la situation asphyxiante dans laquelle se trouve le pays à tous les niveaux ».
Le secrétaire général de l’UGTT a par ailleurs précisé que l’organisation continuera à défendre les droits des salariés et des couches sociales appauvries. « Les questions sociales comme l’amélioration du pouvoir d’achat, la révision du barème de l’impôt et la lutte contre la précarité de l’emploi seront en tête de nos priorités », a-t-il dit, tout en critiquant le manque de transparence du gouvernement en ce qui concerne le programme des réformes convenu avec le Fonds monétaire international en contrepartie du plan de financement de 1,9 milliard de dollars annoncé en octobre dernier.
Walid KHEFIFI