Le problème s’est posé avec acuité il y quelques semaines. Les cliniques spécialisées dans le traitement au dialyse avaient adressé des lettres, poussé des cris de détresse, du fait que les coûts de leurs prestations dépassent largement ce que la CNAM leur rembourse. Du reste, avec la crise mondiale et la surenchère des matières premières, les choses se compliquent cruellement.
I ne s’agit de diaboliser personne. Mais des milliers de vies humaines vivent dans le désarroi, sachant que les hôpitaux n’ont pas les moyens humains, logistiques et financer de suppléer les cliniques. L’Association tunisienne de néphrologie a pris sa décision : il y a juste l’espoir que les parties prenantes se mettent à table et trouvent une sortie de crise.
A savoir que le coût de la séance est de l’ordre de 114 dinars et que ce chiffre n’a été révisé qu’une seule fois en 45 ans, d’après Ali Ma jour, ancien vice-président e la Chambre syndicale des cliniques de dialyse.
L’actualité en relation avec la situation sanitaire en Tunisie n’est pas rassurante : problèmes d’approvisionnement pour 300 médicaments (d’après le président du conseil national de l’ordre des pharmaciens de Tunisie (CNOPT)), propagation d’un triangle infernal de maladies notamment la grippe saisonnière, la bactérie Shigella et le coronavirus. A tous ces problèmes s’ajoute celui de la suspension des activités de toutes les cliniques spécialistes en dialyse à partir du 11 janvier, ce qui peut mener à une « catastrophe sanitaire ». Des vies de milliers de patients subissant des opérations de dialyse sont mises en danger. Plus de 12 000 patients en Tunisie sont sous hémodialyse, selon une déclaration du secrétaire général de l’Association tunisienne de néphrologie, d’hémodialyse et de transplantation rénale Mohamed El Mongi Pacha, à l’occasion de la dix-septième Journée mondiale du rein, correspondant au 11 mars de chaque année. Le processus de dialyse est un processus artificiel de filtrage du sang, qui intervient dans la cinquième étape de l’insuffisance rénale et se fait 6 jours par semaine.
Le 11 Janvier, le jour tant redouté
Le bureau exécutif de la Chambre syndicale nationale des cliniques de dialyse a annoncé, dans un communiqué rendu public le 23 décembre 2022, la suspension des opérations de dialyse dans toutes les cliniques du pays à partir du 11 janvier 2023, à l’exception des cas urgents.
Dans le même contexte, la chambre a lancé un appel de détresse à la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) afin d’agir rapidement et de prendre toutes les mesures nécessaires pour sauver la vie de 11000 patients qui suivent ce protocole de dialyse dans le secteur privé.
Selon le communiqué susmentionné, la décision de suspendre les opérations de dialyse dans l’ensemble du pays intervient suite à l’indifférence de la CNAM face à la détérioration de la situation financière des cliniques actives dans le domaine surtout après la fermeture de la clinique de Sbeitla au cours de la semaine dernière.
Il est à mentionner que la crise financière des cliniques de dialyse est due à la hausse des prix des dispositifs médicaux, des médicaments, du coût de l’énergie et de la maintenance outre les revendications sociales pour l’augmentation salariale alors que la CNAM refuse, d’après le communiqué, l’augmentation du tarif forfaitaire de la séance de dialyse ce qui occasionne d’énormes pertes aux cliniques, d’après le communiqué.
A l’occasion de l’inauguration du centre de médecine d’urgence et de chirurgie à l’hôpital régional de Jendouba le 27 décembre 2022, le président de la République Kais Saied a nié l’existence d’une crise dans le secteur de la santé en Tunisie, considérant que « tout ce qui circule dans certains médias et réseaux sociaux sur l’incapacité des centres de dialyse à s’acquitter de leur tâche ou sur la majoration des prix, n’est que l’écho de rumeurs malveillantes, par lesquelles certaines parties cherchent à porter atteinte à la stabilité de la Tunisie ».
L’arrêt de dialyse entraîne la mort en moyenne dans les huit jours ?
Dans l’insuffisance rénale terminale, l’arrêt de dialyse entraîne la mort en moyenne en huit jours. Si la décision d’arrêt est celle du patient, on la considère en France comme une conduite suicidaire, lit-on dans l’article scientifique « Réflexion éthique autour de la décision – d’arrêt de la dialyse ».
L’arrêt volontaire de dialyse représente actuellement 20 à 30 % des décès des sujets dialysés. C’est aussi la deuxième cause de mort après les causes cardio-vasculaires (plus de 50 %). Il s’agit donc d’un problème éthique majeur, selon la même source.
La maladie, les anomalies congénitales ou une lésion peuvent endommager les reins et les rendre incapables de fonctionner normalement. Lorsque 85 à 90% des reins ne fonctionnent plus, on utilise l’expression «insuffisance rénale au stade terminal» et on recommande la dialyse. Il existe deux types de dialyse, la dialyse péritonéale et l’hémodialyse, selon le Centre hospitalier universitaire vaudois. Et d’ajouter que le type de dialyse qui remplace le travail des reins endommagés à l’aide d’une machine servant de rein artificiel pour filtrer le sang est appelé hémodialyse. Lors de cette procédure, le sang est lentement extrait de l’organisme et traverse un filtre spécial appelé dialyseur, dans lequel les déchets et les liquides excédentaires sont éliminés. Le sang nettoyé et filtré est ensuite renvoyé vers l’organisme. Avant d’effectuer l’hémodialyse, il faut avoir un accès adéquat au système vasculaire. En conséquence, on crée chirurgicalement un type spécial d’accès artérioveineux permanent, lit-on encore dans le site susmentionné.
A noter que les centres d’hémodialyse sont classés parmi les centres spécialisés, selon la même source. L’autorisation de création et d’exploitation par les particuliers d’un centre d’hémodialyse ne peut être accordée qu’à une personne physique, toutefois les autorisations délivrées antérieurement à l’entrée en vigueur du présent décret demeurant valables, d’après le troisième article du Décret n° 98-793 du 4 avril 1998, relatif aux établissements sanitaires privés.
Ghada DHAOUADI