L’an de l’Hégire se fête à Nabeul avec le couscous doré et sucré, symbole de baraka et de bon augure. Les ménagères en savent quelque chose, elles qui s’affairent devant leurs fourneaux conjuguant toutes les recettes afin de réussir au mieux le rendez-vous annuel devenu depuis fort longtemps le rituel des rencontres familiales. Ras El Am est un moment propice pour perpétuer les traditions culinaires propres à ce jour et qui sont respectueusement observées. Cet événement est également l’occasion de promouvoir la qualité alimentaire, la préservation de l’identité et des traditions du terroir, ainsi que la promotion et la valorisation des produits de qualité.
Dans ce sillage, la fête de Ras El Am permettra aux Nabeuliens de découvrir plus amplement l’art de la fabrication des poupées en sucre. Les commerces se mettent au diapason de ces joyeuses fêtes à l’avenue Farhat Hached, Habib Thameur et Habib Karma. D’autres commerces exhibent de beaux fruits secs. Là, les noix, les amandes, les cacahuètes ,les pistaches et les bonbons attendent preneurs ! Plus loin, c’est la boutique des poupées. Il y a du choix, des couleurs ! Se décider pour un, demande du temps et de la réflexion! Affairée à choisir quelques fruits, une sexagénaire qualifie les prix exercés d’«excessifs». «C’est trop cher! Je n’achèterai que les poupées espérant trouver chez un grossiste des fruits secs au prix abordable. Toujours «inaccessibles», les fruits continuent à afficher des prix trop élevés. Mais on ne peut se passer de cette fête très attendue par les enfants qui, reçoivent, à cette occasion un methred de fruits secs, de dattes, d’œufs durs, de bonbons, d’amandes, de morceaux de sucre et garni au centre par une statuette de sucre moulée et colorée représentant des animaux (coq, gazelle, lion), ou des personnages (poupée, cavalier).
Les gens ne reculent pas et achètent malgré les prix exorbitants. De ces poupées colorées, les mères de familles s’en servent le premier jour de l’année de l’Hégire pour décorer les « methreds » de leurs enfants. On choisit, généralement, des poupées à l’aspect féminin pour les filles et des cavaliers à pour les garçons. Pour les plus jeunes, ce sera des représentations animales. Les « methreds » sont des plats montés sur pieds qui ressemblent aux compotiers. Le 1er Muharram du calendrier hégirien, la maîtresse de maison remplit le « methred » de couscous cuit à la viande séchée du mouton de l’Aïd Al Idha et décore le tout de fruits secs, de confiseries, d’un œuf dur safrané et, bien évidemment, de la figurine en sucre.Une recette sucré salé qui mélange fruits secs croquants et viande salée». Au menu des festivités, sont prévues comme activités diurnes et des spectacles de chants liturgiques pour l’animation nocturne.
L’expert en patrimoine Rached Khayati nous a précisé qu’on ne peut pas déterminer l’origine exacte de ces figurines. «Il y a des hypothèses. L’origine de ce rituel revient à une pratique païenne bien avant l’époque carthaginoise. La même tradition existe aussi chez les Siciliens qui fabriquent ce genre de poupées, le 1er novembre, pour la célébration de la fête des morts. Le jour des Défunts ou Festa dei Morti en Sicile est une journée particulière.
La tradition, unique dans la région de Palerme, veut que les enfants reçoivent des cadeaux des défunts dans la nuit du 1er au 2 novembre. Bien sûr, les garçons recevaient un tambour ou une tenue d’indien, les filles, elles recevaient une poupée en sucre. D’autres historiens attestent que c’est une tradition juive. Pour le moment, les hypothèses se multiplient et on ne dispose pas d’une vraie étude scientifique expliquant l’origine de ces figurines» Ce sucre est devenu un élément crucial de notre alimentation quotidienne. Et comme l’explique Rached Khayati , ce sucre a une histoire avec tout d’abord la canne à sucre qui est cultivée en Nouvelle-Guinée, où elle poussait déjà.
Cette culture s’est ensuite répandue jusqu’en Inde et en Chine. C’est d’ailleurs en Inde qu’a commencé le raffinage chimique de la canne à sucre. Les conquêtes arabes font remonter le sucre vers le bassin méditerrannéen. Il arrive en Tunisie et dans les îles de la Méditerranée. L’An de l’Hégire se fête à Nabeul avec le couscous doré et sucré, symbole de baraka et de bon augure. Les ménagères en savent quelque chose, elles qui s’affairent devant leurs fourneaux conjuguant toutes les recettes afin de réussir au mieux le rendez-vous annuel devenu depuis fort longtemps le rituel des rencontres familiales.
Ras El Am est un moment propice pour perpétuer les traditions culinaires propres à ce jour et qui sont respectueusement observées. « Ce couscous est préparé une seule fois dans l’année. C’est un vrai régal Il est préparé avec de la viande séchée ou « quadid » de l’Aïd et les andouillettes sèches et épicées (ousbène chayeh). Une recette sucré-salé qui mélange fruits secs croquants et viande salée.
Kamel BOUAOUINA