Dans le paysage actuel, la pénurie du lait s’est révélée être bien plus qu’une simple contrainte logistique. Alors que les débats et les préoccupations ont émergé au sujet de cette crise laitière, chaque jour apporte son lot de nouvelles problématiques. La résurgence de ces discussions prend une tournure inattendue avec l’importation de lait concentré en provenance de Malaisie, suscitant des débats entre les partisans et les détracteurs de cette pratique, et générant des controverses entre ceux qui mettent en avant la nécessité d’assurer une sécurité alimentaire et ceux qui pointent du doigt les possibles risques sanitaires.

« Fausses composantes »

Le doyen des vétérinaires, Ahmed Rajab, a lancé, le jeudi 25 janvier 2024, lors de son passage sur les ondes de « Mosaïque FM », un cri d’alarme, concernant le lait concentré importé de Malaisie. « Ce produit frelaté et contenant des substances cancérigènes, se trouve sur plusieurs régions et dans de nombreux marchés de plusieurs régions ».

Selon le doyen, l’État est responsable de la protection du citoyen, et de l’application de la loi n°24 relative au contrôle sanitaire vétérinaire, à l’importation et à l’exportation. Il a  noté que le chapitre 6 de la même loi stipule que le contrôle s’effectue au niveau des documents et de l’identité des composantes du produit. «J’ai personnellement analysé ce prétendu lait concentré et découvert qu’il est composé de sucre, d’eau, d’huile de palme et de « matières lait en poudre », un terme qui n’existe pas dans le Codex Alimentarius. En bref, tous ces composants ne peuvent pas être destinés au lait concentré. Par conséquent, l’identité ne correspond pas au nom de lait ».

D’après Rajab, un autocollant a été plaqué sur les boîtes de ce produit, contenant de fausses composantes, afin de «justifier» le processus de son entrée et sa distribution en Tunisie, ce qui est un délit, selon la loi. Et d’ajouter que « l’huile de palme contient une substance toxique et dangereuse, si elle dépasse un certain taux. « Or, rien sur l’identité de ce produit malaisien ne mentionne ces données ».

« L’huile de palmier est tolérée à condition que… »

Mohamed Chaâbouni, sous-directeur du contrôle sanitaire des produits alimentaires d’origine animale auprès du ministère de l’Agriculture, a réfuté, lors d’une intervention sur les ondes de « Mosaïque FM », les informations selon lesquelles le lait concentré malaisien commercialisé en Tunisie, contient des matières cancérigènes. « Ce lait est commercialisé depuis des années et il est soumis au contrôle sanitaire, tout comme tout autre produit d’origine animale. Les rapports des services vétérinaires du ministère de l’Agriculture prouvent qu’il est propre à la consommation », selon la même source.

Chaabouni a explique  d’après le programme « codex alimentarius », ce produit malaisien appartient à la catégorie des laits  concentrés non écrémés contenant des huiles végétales. « Le codex alimentarius définit la quantité des huiles présentes dans le lait (…) L’huile de palmier, qui suscite toute cette polémique, est tolérée à condition que le dosage corresponde aux normes internationales ».

Outre le contrôle sanitaire effectué en Tunisie, tout produit d’origine animale importé est accompagné de certificat de conformité délivré par le pays exportateur, selon Chaabouni

1,7 million de litres du lait demi écrème

Rappelons que les quantités produites et commercialisées du lait demi écrémé subventionné ont augmenté, actuellement, à une moyenne de 1,7 million de litres quotidiennement, a indiqué le ministère du Commerce dans un communiqué publié le 19 janvier 2024 à Tunis. Durant la période actuelle, qui se coïncide avec l’entrée de la période de la production de pointe, le rythme normal d’approvisionnement du lait a été repris, a souligné le ministère.

La régularisation d’approvisionnement en matière du lait est déjà constatée depuis la période saisonnière de basse lactation, grâce à l’ensemble des mesures réglementaires concrétisées par le ministère, depuis le 15 septembre 2023 et qui se poursuivent jusqu’à présent, a encore précisé la même source. Ces mesures visent à renforcer l’offre du lait demi écrémé subventionné, et à garantir la régularité de l’approvisionnement, afin de répondre aux besoins de la consommation familiale.

Le marché du lait a enregistré, depuis un certain temps, une pénurie de l’offre face à une demande accrue, qui a provoqué des pratiques de monopole et des spéculations sur cette matière, notamment en matière de dissimulation des marchandises, d’augmentation des prix et de vente conditionnée. Pour lutter contre ces pratiques, le ministère a rappelé qu’il a mis en œuvre des programmes de contrôle en commun avec les autorités compétentes, appelant les différents intervenants dans le secteur à éviter les pratiques qui perturbent le rythme normal d’approvisionnement et les comportements d’achat du consommateur, et à s’engager à offrir au public les quantités disponibles.

Plus de 195 mille litres du lait ont été saisis, et des mesures juridiques à l’encontre des contrevenants, ont été prises, dont les arrestations et les décisions de fermeture des locaux commerciaux, a rappelé le ministère. Le ministère a appelé les citoyens à rationaliser leurs achats et à contacter les services du ministère, en cas des dépassements, à travers le numéro vert du contrôle économique 80100191, celui du bureau des relations avec le citoyen 1872, et par email mincom.brc@tunisia.gov.tn

Ghada DHAOUADI