Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique s’apprête à mettre un terme au recours à des enseignants vacataires et contractuels dans les établissements d’enseignement supérieur pour ouvrir la voie au recrutement des titulaires du diplôme du doctorat au chômage.
Dans sa réponse à une question écrite adressée par quatre députés à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) relative aux mesures prises pour régulariser la situation des docteurs sans emplois, le ministère a fait savoir qu’il avait demandé aux Universités et aux centres de recherche placés sous sa tutelle d’établir l’inventaire de leurs besoins pédagogiques en y incluant les heures de vacation et les contrats attribués durant l’année universitaire 2024/2025.
Il a également précisé que cet inventaire des besoins pédagogiques a déjà permis de fixer le nombre de postes à pourvoir en faveur des titulaires du diplôme de doctorat dans les diverses spécialités avec un grade de maître-assistant, indiquant qu’un rapport détaillé à ce propos a été déjà transmis aux services de la présidence du gouvernement.
Dans ce même cadre, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a indiqué qu’il contribue actuellement à l’élaboration d’un statut particulier du corps administratif titulaire du diplôme de doctorat au sein d’un groupe de travail formé au niveau de l’Instance générale de la fonction publique rattachée à la présidence du gouvernement, en vue d’ouvrir la voie au recrutement des docteurs dans les entreprises et les établissements publics et les collectivités locales.
Ces mesures visent à régulariser la situation de plusieurs milliers de docteurs au chômage, qui ont multiplié ces dernières années les actions de protestation pour réclamer leur droit au travail.
Le Président de la République, Kaïs Saïed, a appelé, en juillet 2024, le gouvernement à trouver des « solutions urgentes » au dossier des docteurs chômeurs, expliquant que ces derniers sont « les victimes de certains choix erronés dont ils paient cher le prix ».
5000 postes d’emploi dans les institutions publiques
Outre le recrutement des docteurs au chômage au sein des établissements de l’enseignement supérieur, le Chef de l’État avait annoncé, le 13 février dernier, la possibilité de créer au moins 5 000 postes d’emploi pour les docteurs chercheurs au sein de plusieurs institutions et laboratoires de recherche rattachés aux divers ministères. Il avait également ordonné une accélération du processus de recrutement des docteurs au chômage afin de clore définitivement ce dossier, selon un communiqué officiel de la présidence.
Les docteurs chercheurs sans emploi réclament notamment le recrutement dans les établissements d’enseignement supérieur ainsi que dans les structures de recherche rattachées aux divers ministères et aux établissements publics (offices et entreprises publiques) et l’ajout de la fonction de docteur-chercheur dans l’organigramme de la fonction publique.
Le nombre des docteurs chômeurs ou occupant des postes inférieurs à leurs qualifications académiques (enseignants vacataires, fonctionnaires ou simples agents administratifs, etc.) est estimé à environ 7000. Mais des centaines de nouveaux diplômés viennent grossir chaque année les rangs de ces chômeurs « ultra-diplômés » alors que le nombre de postes à pourvoir dans la fonction publique ne cesse de baisser d’une année à l’autre dans un contexte marqué par de fortes pressions sur les finances publiques et que les entreprises publiques et privées ne recrutent pratiquement pas de détenteurs du plus prestigieux diplôme de l’enseignement supérieur.
Les docteurs chômeurs bénéficient du soutien de la Fédération de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (FGESRS), un syndicat rattaché à l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), et de l’Union générale des étudiants de Tunisie (UGET). Ces deux syndicats estiment que les docteurs sans emploi sont avant tout « des victimes de l’inadéquation entre la formation universitaire et les besoins effectifs du marché du travail, qui a produit des milliers de diplômés hautement qualifiés contraints soit au chômage, soit à exercer des emplois mal rémunérés et dévalorisants ».
L’UGET a également appelé, dans ce même cadre, au lancement d’un dialogue national sur la réforme de l’enseignement supérieur afin d’améliorer l’employabilité des diplômes et d’éviter que les Universités restent des « usines à chômeurs ».
Walid KHEFIFI